L'héritage européen

Nos ancêtres français et britanniques sont issus de plusieurs peuples de type caucasien originaires d’Europe, d’Afrique du Nord, du Moyen-Orient et d’Asie Centrale. Des chercheurs en paléogénétique, en 2015, ont étudié l’ADN autosomal (excluant les chromosomes sexuels) des squelettes européens du Mésolithique, du Néolithique et des âges du métal (bronze, cuivre, fer). Ces découvertes nous permettent de mieux situer l’origine du peuplement européen. 

Pendant l’époque paléolithique, de 300 000 à 12 000 ans avant aujourd’hui, la France et les iles Britanniques ont été peuplées par des groupes de chasseurs-cueilleurs issus de quelques espèces humaines, dont celle de l’Homo sapiens.  Il y a 40 000 ans, lors de la dernière époque glacière, on chassait de gros animaux comme les mammouths et les caribous qui parcouraient de grandes steppes herbeuses. Il fallait suivre ces troupeaux pour survivre. À l’époque mésolithique, entre 12 000 et 7 000 ans, les humains perfectionnèrent leurs outils d’os, de pierre et de bois en inventant, entre autres, l’arc et les flèches. Ils maitrisaient bien le feu pour cuisiner les fruits de leur cueillettes, de leur chasse et de leur pêche. Pendant cette période, le climat se réchauffa de façon substantielle de sorte que la faune et la flore montèrent du sud et changèrent les garde-manger des habitants locaux. Les déplacements humains raccourcirent lorsque la forêt boréale, puis la forêt mixte s’installa en Europe. On se mit à chasser les animaux de ces forêts, comme les sangliers, les cervidés, le castor, le lapin et les perdrix. Les fouilles archéologiques révèlent aussi une grande consommation de coquillages comme les escargots, les bigorneaux et les patelles. Ces gens avaient la peau plus foncée que les Européens actuels mais des yeux bleus. Pour en savoir plus sur cette période, on lira avec profit Les Civilisations postglacières. La vie dans la grande forêt tempérée. Histoire de la France préhistorique, La Maison des Roches, de M. Barbaza, 1999, 128 p.

Cette époque fut suivie par l’époque néolithique où l’agriculture s’installa de façon définitive en France. C’est un peuple venu du Croissant fertile ou d’Anatolie où l’agriculture est née, il y a 11 000 ans, qui l’amena en Europe, il y a 7 000 ans. Ces gens ont apporté la culture du blé, de l’orge, de l’avoine et la cuisson dans des plats de céramique, décorés de façon diverse, selon les régions.  Ils savaient polir la pierre et se construire des maisons puisque leur vie était désormais sédentaire. Ces gens avaient la peau claire, les cheveux bruns et les yeux majoritairement foncés et plus rarement bleus ou verts. Assez rapidement, ils ont assimilé les autochtones à la peau plus foncée et aux yeux bleus. Les Européens actuels du Sud-Ouest sont génétiquement très proches de ce peuple venu d’Anatolie. La Sardaigne, à cause de son isolement historique,  semble être le principal refuge de cette ethnie, parce qu’elle ne se serait pas mélangée avec les peuples indo-européens venus par la suite. Précisons ici que les habitants actuels de l’ancienne Anatolie ou du Proche-Orient ne sont plus du tout les mêmes qu’autrefois. Les fouilles archéologiques pratiquées en Anatolie démontrent que ces gens pratiquaient la culture des céréales, des légumineuses, de plusieurs légumes aromatiques et même d'herbes et épices spécifiques. Ils adoraient l'orge qui était leur principale culture en Anatolie. Mais leur arrivée en France favorisa la culture du blé parce que le climat français moins sec que l'Anatolie favorisait la culture du blé. Et ces gens connaissaient la vigne puisqu'on la cultivait en abondance, dans l'ancienne Mésopotamie. Ces gens se faisaient aussi plusieurs sortes de bières avec l'orge. Cette première grande culture française et britannique consommait des lentilles, des pois secs et des gourganes. Ils cuisinaient aussi le cresson, le sésame et les oignons. Leurs épices préférées étaient la coriandre et le cumin. Ces précisions sont données dans les textes trouvés dans le site préhistorique de Tell Sabi Abyad, au nord de la Syrie, en 1986, par une équipe de chercheurs néerlandais. Cet endroit existait, il y a 7 000 ans, au moment où une partie de sa population s'est déplacée vers la France et les iles Britanniques.

Il y a 5 000 ans, la France a commencé à recevoir des tribus de langues indo-européennes qui se sont progressivement installées dans toutes les régions, en se métissant avec les  agriculteurs venus d’Anatolie. Ces gens ont rapidement pris possession des lieux car ils avaient domestiqué le cheval et pouvaient ainsi se déplacer rapidement. Ils étaient originaires des steppes de l’Europe de l’Est et de l’Asie Centrale, au nord de la mer Noire et du Caucase. Parmi ces groupes de langue indo-européenne, il y avait les ancêtres des Celtes, des Grecs, des Germains, des Romains qui conquirent tour à tour la France, par la suite. Ces gens venus des steppes nordiques avaient les cheveux pâles et les yeux clairs. Leurs gènes se sont davantage propagés dans le nord de l’Europe comme en Scandinavie et dans les iles britanniques alors que dans le sud de l’Europe, les traits anatoliens sont demeurés plus importants. C’est pourquoi notre population est aussi génétiquement métissée. 

Il en est de même pour la cuisine. La cuisine française est le résultat de nombreux métissages qui se sont produits au cours des siècles. Nous tâcherons les prochaines semaines, de faire le tour des cultures culinaires européennes qui nous concernent.

À la semaine prochaine !

Michel Lambert, historien de la cuisine familiale du Québec