La cuisine au vin rouge, cette semaine!

Nous poursuivons l'histoire de la cuisine avec diverses boissons, cette année. Cette semaine, je vous parle de la cuisine au vin rouge. C'est bien sûr un héritage français renouvelé, au XXe siècle, par l'immigration italienne, portugaise, espagnole, hongroise et chilienne. Les vins rouges espagnols étaient déjà présents au Québec, au XVIIe siècle. Quant aux vins rouges français, ils provenaient surtout du Sud de la France et de la Loire, sous le Régime français. Quand aux vins de Bordeaux, on se rappellera que cette région a longtemps été sous domination anglaise de sorte qu'après la Conquête de 1760, ils sont devenus encore plus présents dans les familles des administrateurs britanniques installés au Québec.

À partir du milieu du XIXe siècle, avec le retour des Français au Québec, la bourgeoisie canadienne-française s'est remise au vin en appréciant la grande qualité des vins de Bordeaux. L'engouement pour ces vins s'amplifia, dans les années 1980, avec la popularité grandissante de chroniques télévisuelles et journalistiques consacrées au vin, en particulier celles de Phaneuf, de Chartier, d'Aubry et récemment de Lapeyrie. La majorité de la population s'apprivoisa alors au vin rouge qu'on aimait moins, dans les années 1960, que le vin blanc. La production québécoise nous offre de plus en plus des vins rouges bien acceptables malgré la nordicité de notre climat. Avec le réchauffement climatique qui s'annonce, la production du vin rouge sera de plus en plus présente chez nous. 

Faisons le tour de notre cuisine au vin rouge à partir d'un article tiré de mon 5 e volume, L'histoire de la cuisine fmiliale du Québec, Le monde à notre table: ses cuisines et ses produits, p. 732-733:" Le vin rouge sec n'est pas en reste et se cuisine de façon anecdotique en entrée comme dans la tête fromagée, la mousse de truite ou le pâté de foie de porc ou de poulet. On en met dans des soupes à l'oignon, aux betteraves et aux tomates avec vermicelles et petits légumes. Dans les plats principaux de poisson ou de fruits de mer, on le rencontre parfois, en région maritime, dans les ragouts de mako (requin), de lamproie, d'anguille, d'esturgeon noir, de morue salée ou de pétoncles en combinaison avec des tomates. Mais cette association est presque inconnue pour la majorité des Québécois de l'Ouest. Le vin rouge est plutôt utilisé pour le gibier de toutes grosseurs, comme les canards sauvages de forêt ou de mer, l'outarde, le lièvre, la prerdrix, le castor, le loup-marin et le phoque du Groenland, l'orignal, le caribou et le cerf de Virginie. On le voit dans leurs ragouts, leurs braisés ou leurs sauces d'accompagnement des steaks ou des rosbifs. Viennent ensuite les mêmes genres de plats pour le boeuf, l'agneau et les nouveaux grands oiseaux d'élevage comme l'émeu et l'autruche. J'ai aussi vu des viandes blanches  apprêtées au vin rouge comme le lapin, le poulet, le porc, les côtes de veau et le faisan en ragout. J'ai noté plusieurs recettes d'abats comme le foie, le coeur et les rognons apprêtés au vin rouge. Au total, mon répertoire comprend 350 recettes avec du vin, dont 60 % de vin blanc et 40 % de vin rouge."

Depuis les années 2000, le vin rouge est beaucoup plus populaire que le vin blanc, chez les Québécois. Mais, en cuisine, le vin blanc sec demeure plus présent que le vin rouge sec. Nous parlerons des vins doux ou fortifiés, la semaine prochaine.

Bonne semaine à tous, avec patience et résilience, en particulier pour ceux qui ont décidé de ne pas prendre d'alcool, cette semaine. Pour les autres, un bon verre de rouge, avec modération, c'est bon pour le coeur!

Michel Lambert, historien de la cuisine familiale du Québec