Soumis par Michel Lambert le
Comme il est écrit au haut de cette page, le QUÉBEC CUISINE depuis 12 000 ans. C’est l’âge de notre territoire depuis que l’espèce humaine l’habite! Ce territoire a changé de climat plusieurs fois, favorisant des espèces animales et végétales diverses qui ont nourri plusieurs ethnies, au cours des âges. Mais plusieurs espèces de plantes, plusieurs espèces animales, quelques ethnies même sont disparues au cours de ces millénaires, de ces siècles, pour toutes sortes de raisons. Ainsi va la Vie planétaire!
Notre espace, notre environnement naturel, nos villages, nos villes, nos populations changent sans arrêt tout comme nos connaissances, nos habitudes, nos préférences alimentaires et notre culture culinaire. Pourquoi donc parler d'attachement au patrimoine culinaire du Québec dans un tel contexte de changement perpétuel?
C’est que l’être humain est doué d’une forte mémoire affective qui enregistre profondément en lui, tout ce qui l’a jadis rendu heureux. L’être humain cherche le temps perdu, dirait mon ami Proust! Il veut retrouver le gout de la petite madeleine que lui donnait sa mère, au retour de l’école. Il veut, en fait, retrouver la chaleur, l’amour associé à l’aliment. Les Anglais ont un nom pour ce phénomène humain : c’est le comfort food. Le patrimoine culinaire d’un peuple, c’est le lien affectif qu’on a avec la cuisine de nos ancêtres. Vouloir le maintenir vivant, c’est vouloir partager ce bonheur avec nos enfants et leurs enfants. C’est un acte trait d’union.
Ce n’est pas vouloir retourner dans le passé et refuser le présent et le futur. C’est simplement dire oui à la vie qui vient de quelque part et qui s’en va toujours ailleurs. Pour moi, c’est l’arbre qui illustre le mieux cette idée. L’arbre, comme notre cuisine, a des racines très profondes qui sont cachées à notre vision superficielle des choses. Et il ne cesse de faire pousser, grâce à elles, de nouvelles branchettes, chaque année, qui portent la vie future de l’espèce.
La cuisine d’un peuple est ainsi faite qu’elle se nourrit de multiples racines culturelles qui appartiennent à son passé lointain et récent. Elle s'enrichit sans arrêt, à mesure que les technologies de communication accélèrent les contacts culturels. Chaque pays, chaque région se construit de façon originale à cause de son passé particulier, de sa sensibilité gustative particulière issue de ses racines culturelles entremêlées, même si les influences et les modes sont les mêmes pour tous les pays. On est le résultat de son passé. Les Québécois, la cuisine québécoise sont un bouquet culturel particulier issu d'une vingtaine de cultures culinaires différentes, différentes de celles de la France, des États-Unis ou du Royaume-Uni.
Je vous parle, cette semaine, de deux aliments qui appartiennent à l’histoire du Québec : la courge et la farine d’orge. La première est présente chez nous depuis le XIVe siècle; la seconde depuis le XVII e siècle. La première est reliée à notre héritage iroquoïen du Saint-Laurent, comme l’a dit Jacques Cartier, en la voyant dans un jardin de Québec ou Stadaconé, en 1535. La seconde est liée à la Nouvelle-France, telle que citée par Champlain, en 1610. Mes recettes originaires d’un peu partout vous permettront de vous relier à nos racines huronnes, écossaises et françaises, mais aussi au passé lointain du Moyen-Orient avec l'orge et du Pérou et de la Bolivie, avec la courge.
Bonne cuisine et bonne lecture!
Michel Lambert