Matrimoine culinaire du Québec plutôt que patrimoine?

La culture européenne est fondamentalement patriarcale; d’où le terme de patrimoine plutôt que de matrimoine. Au Québec, cependant, l’une des cultures fondatrices était plutôt matriarcale. Ce sont les femmes de langue iroquoïenne, particulièrement les grands-mères, qui avaient pour mission de sauvegarder les nations de cette même origine ethnique. La Fête des mères, célébrée ce dimanche, m’invite à réfléchir sur le rôle primordial de nos mères dans la transmissions de nos recettes familiales. Ce rôle découle d’abord de la fonction nourricière donnée aux femmes par la Vie; ce sont les femelles qui nourrissent leurs petits, chez les mammifères. Donner le sein pour nourrir se prolonge par le don d’aliments de plus en plus soutenants pour maintenir les petits en vie et en santé. C’est la raison évidente pour laquelle la grande majorité des ethnies ont donné la fonction de nourrir les enfants aux femmes. Les femmes transmettent donc les savoir-faire, les préférences alimentaires de leur groupe ethnique à leurs descendants. Mais le rôle nourricier des femmes  a commencé à se modifier à la fin du XIXe siècle, avec les premières manifestation du féminisme contemporain qui proposent une nouvelle répartition des tâches parentales. Si, auparavant, les hommes étaient physiquement construits pour aller chercher les aliments nourriciers par la chasse au gros gibier, la pêche aux gros poissons, les travaux agricoles et leurs productions alimentaires, leur rôle a considérablement changé avec l’invention d’outils mécanisés, électrifiés et électronisés. L’égalité des sexes revendiqué par les féministes a eu comme conséquence de modifier les rôles traditionnels des pères et des mères. Les pères sont aujourd’hui, aussi nourriciers que les mères, et les mères vont chercher les aliments par la force de leur travail rémunéré, comme les hommes le faisaient, seuls, autrefois. Est-ce à dire que notre espèce est en train de se modifier, comme on l’a vu dans d’autres espèces qui partagent déjà l’égalité de la fonction nourricière depuis des millions d’années?

C’est en tout cas, ce qui s’annonce pour notre espèce qui a trouvé plusieurs moyens désormais de transmettre la vie et la culture familiale. Mais une chose demeurera nécessaire dans le rôle de maternage des enfants, c’est l’amour du parent exprimé par le soin qu’il prend à bien cuisiner pour ses petits. Bien cuisiner, cela veut dire cuisiner santé la plupart du temps, et cuisiner festif de façon occasionnelle. Les beignets issus de nos cultures fondatrices sont une belle occasion de faire la fête, comme je vous le propose, cette semaine.

Michel Lambert