Soumis par Michel Lambert le
Notre fête de Pâques a plusieurs sources culinaires qui se sont entremêlées au cours de l’histoire. Le terme lui-même vient du mot hébreu pessa’h qui signifie « passage ». Les Juifs se rappellent annuellement la sortie du peuple juif de l’Égypte et la naissance d'Israël, en mangeant le pain sans levain et en sacrifiant un agneau, à cette occasion, pour se rappeler les événements liés à la naissance de leur identité nationale et religieuse. Le pain sans levain et l'agneau rappelle cette partie de notre héritage.
Les premiers chrétiens qui sont issus des juifs d’Israël célébraient la pâque juive à leur façon parce que c’est lors de la pâque juive que Jésus, leur maitre et fondateur de leur religion, fut crucifié et est ressuscité le troisième jour suivant sa mort. Le mot juif est donc devenu pascha, chez les Romains, et Pâques en français, au Moyen-Âge. On se rappellera qu’en France, au début du Moyen Âge, le pays était peuplé de Celtes conquis par les Romains et que le christianisme s’installait progressivement dans les citées fortifiées du pays. Les tribus germaniques sont entrées en France pendant 200 ans en bouleversant tout sur leur passage. Et elles se convertirent peu à peu au christianisme apporté en France par les Romains. Pour faciliter la conversion des peuples germaniques, l’Église de l’époque toléra certaines coutumes germaniques en les christianisant. Ces peuples originaires du Nord avaient leur mythologie dans laquelle le lapin jouait un rôle symbolique. Sa fécondité légendaire signifiait le retour de la vie avec le soleil et la lumière printanière. Le premier de l’An germanique avait donc lieu le printemps. Les lapins de Pâques sont donc une réminiscence de nos ancêtres germaniques (Francs, Vikings, Wisigoths, etc.). Comme au printemps, le retour de la chaleur mettait en danger les viandes abattues à cette occasion, les peuples germaniques les fumaient pour pouvoir les conserver tout l’été. Les jambons faisaient donc partie traditionnellement de leur Premier de l’An. En christianisant cette fête, l’Église accepta de remplacer l’agneau traditionnel par le jambon. Dès le début du christianisme, l'Église avait adopté des coutumes alimentaires différentes de celles de la religion juive, dont la consommation de viande de porc, habitude grecque et romaine. Et elle avait aussi adopté les coutumes culinaires festives de ces gens comme les oeufs, les crêpes, les tartes et les gâteaux rappelant la rondeur du soleil qui revenait le printemps. -- Le premier de l'An romain se situait en février ou mars, presque 'en même temps que la fête pascale actuelle. -- Toutes les mythologies et tous les rituels alimentaires de nos peuples fondateurs célébraient le retour de la lumière. C'est pourquoi le christianisme n'eut pas de misère à convertir ces peuples à ses croyances. Le Christ se présente comme celui qui a vaincu la noirceur et le mal symbolisé par la nuit et le froid. Il est celui qui apporte la clarté et l'espérance du matin. Quelles que soient nos croyances personnelles, nous sommes tous marqués par ces symboles millénaires encore présents dans notre culture. Permettez-moi, enfin, d'ajouter les croyances des autochtones qui fêtaient aussi le retour du soleil. La lune printanière était liée aux fleurs, aux papillons et aux oiseaux. Les Inuit faisaient des festins de fleurs, Les peuples algonquins consommaient des ragouts de petits oiseaux, tradition que nous avons conservée jusque dans les années 1950. Et les sources d'eau avaient un pouvoir guérisseur pour les peuples iroquoïens. Notre quête d'eau de Pâques vient d'eux. Ils se levaient tôt pour voir l'étoile du matin, Vénus, et ramasser la première eau printannière imbue d'un pouvoir mystérieux. La fête de Pâques québécoise est riche de toutes les cultures de nos ancêtres,
Je vous souhaite des Pâques signifiantes pour vous et votre famille.
Michel Lambert, historien de la cuisine familiale du Québec.