Soumis par Michel Lambert le
J’ai besoin de temps et d’espace pour vous situer les aliments marqueurs de notre cuisine. Je le ferai donc en plusieurs blogues, à partir de nos garde-manger saisonniers. Commençons avec la saison verte; celle où l’on voit du vert par terre par opposition à la saison blanche où l’on voit de la neige.
D’avril à novembre inclusivement, la mer a nourri des milliers de nos ancêtres autochtones, pendant des milliers d’années. Ceux qui habitaient à l’intérieur des terres pendant la saison blanche, descendaient toujours vers la mer, le printemps venu, pour profiter de ses largesses. On peut dire qu’elle était le principal garde-manger de l’été. Les grands lacs de l’intérieur avaient le même pouvoir attractif. Le rapprochement de ces grandes étendues d’eau se faisait toujours au début de la fonte des neiges et toujours avant l’arrivée des moustiques. Le vent, plus fréquent sur les grèves, permettait une vie plus confortable, spécialement lors des grandes chaleurs de l’été.
Dans l’est du Québec, au milieu du XIXe siècle,les familles pouvaient facilement se rassasier, tour à tour, de vagues de capelans qui roulent sur les grèves, puis d’éperlans qu’on pêche sur tous les quais. On pouvait prendre, à l’embouchure des affluents du fleuve et du golfe, l’alose savoureuse qui arrive de la mer au début de l’été comme le gaspareau, cousin du hareng. Les gens du Bas-Saint-Laurent et de Charlevoix se régalaient, sans souci, de bars rayés qui retournaient, eux aussi, à la mer après s’être reproduits dans les embouchures des affluents du fleuve et avoir passé l’hiver dans le haut de ces rivières. Juin voyait arriver les saumons de l’Atlantique qui commençaient à remonter les rivières impétueuses vers leur pays natal, puis juillet voyait les esturgeons noirs retourner à la mer, autour de l’ile d’Orléans et le long de la Côte-du-Sud. Plus au sud, la pêche à l’esturgeon jaune suivait celle du saumon qui était elle-même suivie par celle de l’anguille; l’anguille était si importante pour les autochtones de toutes les régions du Québec et les premiers Français établis dans la plaine du Saint-Laurent qu’elle a même servi de monnaie d’échange, à la fin du XVIIe siècle. Nos ancêtres autochtones fumaient l’excédent de toutes ces pêches pour se prémunir contre les disettes fréquentes de l’hiver. Les Français salaient au moins un baril de chaque variété de ces poissons, en particulier du saumon, de l’esturgeon et de l’anguille. Lorsqu’on avait des amis pêcheurs en haute mer, on se commandait aussi, en juin et juillet, de la morue, de la sardine, du hareng, du maquereau qu’on salait et/ou fumait pour la saison blanche. Au début du XXe siècle, les familles de l’Est pouvaient aussi s’approvisionner à l’arrivée des bateaux de pêche, d’aiglefin, de flétan de l’Atlantique, de loup atlantique ou tacheté, de flétan du Groenland plus connu sous le nom de turbot et très exceptionnellement, d’une variété de thon, à la fin août. En même temps, sur les quais, on pêchait de la truite de mer quand elle remontait dans le haut des rivières pour l’hiver.
Les familles d’origine autochtone ou européenne de l’Est et du Nunavik ramassaient aussi plusieurs coquillages, en été. Les coques (myes), les clams (clovisses), les couteaux, les bigorneaux (littorines), les buccins (bourgots) les moules en Basse Côte-Nord et au Nunavik, les palourdes de dune ou de mer (mactres, quahogs) et les pétoncles faisaient partie surtout du menu du début ou de la fin de la saison verte. On se méfiait déjà des coquillages ramassés lors des chaudes journées de l’été. Les crustacés ramassés en avril continuent de faire partie de nos réunions de familles ou d’amis, pendant l’été : homard, crabe et crevettes se préparent de mille et une façons avec les verdures, le barbecue et les produits laitiers en abondance. Ajoutons l’écrevisse qui faisait vraiment partie du menu de l’été, en Montérégie aussi bien qu’au bord des lacs du Nord où vivaient les familles de langue algonquienne.
Je vous donne une dizaine de recettes de notre répertoire, sans thématique, cette semaine. Elles sont issues de toutes, nos régions, comme d’habitude.J'ai déjà donné plusieurs recettes de ces aliments marqueurs de notre cuisine et j'en donnerai d'autres, dans les prochaines semaines.
Je vous parlerai encore des aliments marqueurs de notre environnement maritime, la semaine prochaine.
Bonne semaine.
Michel Lambert
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