Soumis par Michel Lambert le
Le cacao est une fève qui pousse dans les régions tropicales des 2 Amériques. En 2007, des archéologues prouvaient sa consommation en boisson depuis au moins 3 160 ans avant aujourd’hui, à Puerto Escondido, sur les rives de la rivière Ulùa, au nord-ouest du Honduras. Le cacao a ensuite été utilisé par les Olmèques, les Mayas et les Aztèques pour parfumer leur cuisine au maïs et au chia.
C’est en 1502 que Christophe Colomb a goûté à cette boisson américaine pour la première fois. Ce fut l’engouement instantané pour lui comme pour tous les Espagnols qui s’établirent au Mexique, dans les Antilles et en Amérique centrale. C’est Cortès qui en apporta, le premier, au roi d’Espagne, en 1528. Le cacao s’est répandu en Europe à partir de Séville. La demande fut tellement grande que les Espagnols décidèrent d’en faire le commerce pour toute l’Europe en réduisant les autochtones locaux en esclavage, asservis à cette culture du cacaotier. Face à l’insuffisance de la production espagnole, les Portugais en transplantèrent en Afrique de l’Ouest et au Brésil alors que les Hollandais en transplantèrent en Inde et en Indonésie. Aujourd’hui, le cacao vient principalement des Antilles, du Venezuela, de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, du Sri Lanka, du Timor-Oriental et de l’Indonésie.
Ce sont les Espagnols qui furent les premiers Européens à métisser leurs desserts et leur cuisine avec la cuisine mexicaine, dont le chocolat était un aliment-vedette lié à la cuisine des viandes. Les Espagnols eurent l’idée d’associer le cacao au sucre pour diminuer son amertume naturelle. Au Mexique, on continue d'associer le cacao à la viande. Vous connaissez sans doute le célèbre Mole Poblano qui associe le chocolat à la dinde ou au poulet dans une sauce bien épicée et sucrée comme en Espagne.
Mais c’est Anne d'Autriche, d’origine espagnole, qui l’amena en France, lors de son mariage à l'âge de 14 ans, en 1615, avec le jeune roi de France, Louis XIII. C’est elle qui initia son fils, Louis XIV, à boire du chocolat chaud avant d’aller dormir, vers 1644. Lorsque Louis XIV devint roi, toute l’aristocratie française se mit au chocolat chaud. Le cacao est donc traversé au Québec, avec les administrateurs français de la colonie de cette époque. Pehr Kalm, le célèbre voyageur suédois venu au Québec en 1749, raconte que le chocolat chaud faisait partie des breuvages matutinaux, dans la colonie. Et il ajoute que le sucre d’érable est bien supérieur au sucre blanc pour sucrer le chocolat chaud.
Enfin, disons que la poudre de cacao s’est généralisée vers la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, au Québec, commercialisé depuis 1728, en Angleterre, par une compagnie anglaise, Cacao Fry. Cette compagnie fondée par Joseph Storrs Fry inventa une machine pour broyer finement des fèves de cacao. Son installation aux États-Unis et au Canada contribua largement à diffuser des recettes de desserts au chocolat. d'origine anglaise.
Avant de faire des gâteaux, des tartes, des crèmes, des galettes et des biscuits au chocolat, on se faisait des chocolats chauds avec du cacao, du lait chaud et du sucre. Quand j'étais enfant, on parlait plutôt de "cocoa" que de "cacao", copiant le nom écrit sur les boites de Cocoa Fry's. Ceux qui sont allé visiter le Mexique et les pays producteurs de cacao comme le Guatémala, peuvent ramener des brisures de l'enveloppe de fèves de cacao avec lesquelles on peut se faire des tisanes de cacao. L'expérience gastronomique est vraiment santé et intéressante quand on sait que ces brisures sont faites par les artisans locaux du Guatemala.
Je vous souhaite d'explorer de nouvelles avenues et de nouvelles boissons avec la fève de cacao. Pourquoi ne pas créer une boisson chocolatée pour Pâques!
Michel Lambert, historien de la cuisine familiale du Québec.