Soumis par Michel Lambert le
C’est étrange comme les bonnes idées reviennent à l’avant-scène! Quant j’étais enfant, les filles n’avaient pas beaucoup de choix d’études : elles pouvaient devenir infirmière, institutrice, hôtesse de l’air, téléphoniste chez Bell ou faire leur cours d’art ménager où elles pouvaient apprendre à gérer une maison en s’occupant de la cuisine, de la couture, du ménage et du budget de la famille. Ce cours s’appelait L’art ménager et il était donné par des religieuses ou des femmes laïques choisies par elles. Les garçons n’avaient évidemment pas accès à ce cours au temps où les rôles familiaux étaient rigoureusement campés. On surnommait les femmes en charge du foyer, des « maitresses de maison ».
Mon propos n’est pas du tout de dire que ce temps était le bon temps ni que cette répartition des tâches était une bonne idée. Mon propos est plutôt de réfléchir sur la signification du mot « ménager » et son rapport avec la vie d’aujourd’hui et les valeurs actuelles. Saviez-vous d’abord que le mot ménage et ménager a les mêmes racines linguistiques que le mot maison et qu’il est apparenté au mot domestique? L’art ménager, c’est l’art de s’occuper d’un ménage installé dans une demeure, un logis. Un ménage, c’est deux personnes au minimum qui vivent ensemble et partage un logis et les tâches habituelles de la cuisine et de l’entretien qu’on appelle souvent le ménage, d’ailleurs. Mais liée à ces fonctions de base, il y a aussi la nécessité de ménager, c’est à dire de prendre soin des biens de la maison, de les utiliser pleinement en les réparant si besoin, et de jeter le moins possible de choses. Or l’art de prendre soin, de ménager les biens et la nourriture, par exemple, prend de nouveaux noms, aujourd’hui : on parle de récupération, de simplicité volontaire, de protection de l’environnement qui vise, en fait, à prendre soin de nos biens, de la planète pour que nos enfants puissent en profiter aussi.
Ménager la nourriture, c’est prendre soin d’elle pour qu’elle soit utilisée intelligemment et non pas jetée à cause de l’abondance, de sa forme ou de ses imperfections pendant que des millions d’êtres humains crèvent de faim. Quand nos ancêtres tuaient un animal, ils récupéraient tout ce qu’ils pouvaient qui pourrait nourrir, protéger ou habiller la famille. La graisse, les os, la peau, entre autres servaient à faire d’autres plats; on jetait le moins possible. On développait plein de recettes avec les restes des repas précédents. Il y avait même des jours et des repas consacrés aux restes. Malheureusement, aujourd’hui, on jette plus du tiers de la nourriture que l’on achète. Avez-vous pensé à toute la pollution qu’on a créé inutilement en jetant ces restes? La restauration et le monde de l’alimentation commencent à s’éveiller à ces restes en trouvant des moyens de les récupérer et de les partager avec les démunis de nos sociétés. Mais que nous avons du chemin à faire pour bien apprendre à ménager! Que nous avons perdu l’art de ménager!
Ménager, c’est être éco-responsable! C’est soutenir l’agriculture locale en se nourrissant avec des aliments de proximité. C’est apprendre à gérer les surplus avec ceux qui ont besoin d’aide : les pauvres, les vieillards esseulés, les immigrants sans ressources. Ménager, c’est bien prendre soin de notre maison, de notre pays, de notre planète. Ménager, ce n'est pas courir les spéciaux en achetant des produits qui viennent de Chine après avoit pollué toute la planète pour les laisser pourrir dans le frigo!
Mettre un peu plus de conscience dans mes gestes culinaires, c'est, en tout cas, mon objectif personnel!
Michel Lambert