Soumis par Michel Lambert le
Saviez-vous que les concombres ont suivi un long chemin avant d’arriver chez nous ? Ils sont originaires de l’Inde et ce sont les marins marchands de l’Ancienne Égypte qui sont allés le chercher là-bas, il y a plus de 4 000 ans. Les Juifs exilés en Égypte l’ont adopté puisqu’ils en parlent dans la Bible. Et lorsque les Romains ont conquis la Judée au premier siècle avant notre ère, ils ont ramené le concombre à Rome.
Ce sont les jardiniers romains qui l’ont adouci car au début, le concombre était amer. Au VIII e siècle, le concombre était présent partout en Europe, en particulier dans les jardins des monastères. Déjà, à l’époque, on conservait les petits concombres excédentaires de la récolte dans le sel. Ce sont les Francs qui eurent l’idée d’ajouter du vinaigre au sel pour conserver les cornichons et les concombres plus longtemps. C’est pourquoi la tradition des cornichons est si présente dans les pays de culture germanique, comme l’Allemagne et la France. Dans les pays slaves, on pratiquait aussi la conservation par le sel mais avec la lactofermentation. Les cornichons russes et polonais sont de cette école culinaire. Mais pour revenir au concombre, c’est Louis Hébert qui planta les premiers concombres au Québec, en 1618. Jacques Cartier avait cependant signalé la présence de concombre à Québec, dans les jardins de Stadaconé, en 1535. « Pareillement, ils ont assez de gros melons et concombres, courges, pois et febves de toutes couleurs, mais non de la sorte des nostres. » La chose est plus qu’étonnante pour un historien des aliments! On pourrait penser que Cartier ne fait pas la différence entre un concombre et une courgette verte, mais il parle aussitôt des courges comme il parle aussi des pois et des fèves, faisant bien la distinction entre les deux. Or les pois et les concombres sont bien d’origine étrangère, selon les biologistes. Que penser de tout cela ? Il faut, je crois, pour l’instant, attendre d'autres découvertes archéologiques pour confirmer ou infirmer l'affirmation de Cartier. Pour l'instant, attardons-nous aux témoignages des voyageurs comme Kalm qui dit qu’on mangeait beaucoup de concombre, au temps de la Nouvelle-France, en particulier avec de la crème, ce qu’il n’avait pas l’air de connaître, lui-même, malgré ses origines scandinaves. Ce qui vient démontrer que le concombre est un aliment marqueur de notre patrimoine culinaire. Je vous invite à essayer les recettes de concombre en toute saison maintenant que nous pouvons en récolter à l’années longue, avec les serres écologiques de Saint-Félicien ou celles de Montréal.
Bonne semaine à tous
Michel Lambert, historien de la cuisine familiale du Québec