Cap sur les pétoncles!

Il existe deux sortes de pétoncles sauvages chez nous: le pétoncle d'Islande et le pétoncle géant. Le premier est plus petit que le deuxième et ne se pêche pas aux mêmes endroits. Soyons plus précis: le pétoncle d'Islande vit dans l'estuaire et le golfe du Saint-Laurent, entre 2 à 300 mètres de profondeur; le pétoncle géant vit uniquement dans le golfe Saint-Laurent, entre 4 et 100 mètres de profondeur. Le petit pétoncle d'Islande est de couleur orange alors que le géant est plutôt d'un blanc grisâtre. Le plus petit qui mesure 10 cm en moyenne a une forme plus convexe et côtelée que le géant qui mesure autour de 20 cm. Les petites ailes du côté de sa charnière sont plus inégales que celles du pétoncle géant. Les deux se déplacent par bonds à l'aide de leur valve supérieure qu'ils referment abruptement pour se propulser. Ils ont connaissance de tout ce qui se passe au fond de l'eau par des dizaines de petits yeux bleus qui se situent sur le pourtour de leur coquille inférieure.

Les nations autochtones qui habitent au bord de la mer connaissent bien les pétoncles. Les Micmacs les appellent sasqale's. Ils les pêchaient, autrefois, à l'aide d'un grand bâton au bout duquel ils accrochaient un filet qu'ils trainaient au fond de l'eau pour les ramasser. Les Innus de Pakua Shipu (Saint-Augustin) en Basse- Côte-Nord les appellent papatshesh et les consomment depuis toujours. Ils ont d'ailleurs formé une compagnie de pêche aux pétoncles avec les villages de Ekuanitshit et Unamen Shipu  (Mamit Innuat) en achetant l'ex-compagnie des frères Fortier de Sept-Iles. Depuis 2015, la compagnie appartient à la communauté innue de Mingan. Les Inuit de la Baie Diana, près de Quaqtaq, pêchent aussi les pétoncles qu'ils ont même esploités commercialement au moment où j'étais chef-propriétaire de la Maison de la Rivière, au Saguenay. On pouvait acheter d'eux de superbes pétoncles géants fumés à point. 

La pêche commerciale des pétoncles est née au début des années 1970, aux Iles-de-la-Madeleine. En 2002, cette pêche représentait 6% des profits de la pêche aux Iles. Suite à une forte demande à la fin du XXe siècle, le Mapaq a favorisé la création de l'élevage de pétoncles chez nous. C'est ainsi qu'est née Pétoncle 2000 qui ensemençait 19 millions de pétoncles en 2001. Les pétoncles géants que nous achetons, aujourd'hui, dans nos poissonneries et supermarchés proviennent de nos sites d'élevage de pétoncle, dont celui des Fermes marines de Newport et de Gaspé. La production est supervisée par les spécialistes de Pêches et Océans Canada, à Mont-Joli.

Les pétoncles sont connus en France sous le nom de coquilles Saint-Jacques. En Minganie, on les appelle aussi des padous. La coquille Saint-Jacques est un classique de la Haute cuisine française. Ches nous, on les aime simplements poêlés au beurre comme à Rimouski, en pot-en-pot aux Iles-de-la-Madeleine et en pizza aux fruits-de-mer, à Havre-Saint-Pierre. On consultera mon livre sur la cuisine de la mer, Volume 2 de la collection L'histoire de la cuisine familiale du Québec, pour avoir des exemples de recettes de pétoncles de chez nous.

Je vous donne aussi quelques recettes de ce coquillage, cette semaine.

Michel Lambert, historien de la cuisine familiale du Québec