Les vinaigres

Le vinaigre est un liquide acide issu d’un alcool qui a fermenté au contact prolongé de l’air. Des bactéries acétiques présentes dans l’air viennent se nourrir de l’éthanol qu’on trouve dans les vins, la bière, le cidre, ou l’hydromel qu’on laisse débouché. En France, au XVIIe siècle, on préparait son vinaigre à la maison à partir d’une mère de vinaigre dont on gardait toujours une partie, d’un vinaigre à l’autre. On ajoutait les restes de vin ou les vins moins bons à boire à la mère du vinaigre qui transformait ces vins en vinaigre pendant les 5 ou 6 semaines suivantes. À la fin du Régime français, on se faisait du vinaigre d’érable, comme l’écrit le Dr Gaultier dans son mémoire sur le Canada : « L’eau d’érable, étant renfermée dans un baril, s’aigrit; mais moins promptement que la liqueur qu’on tire des cannes à sucre. On expose un baril au soleil pendant l’été et l’eau d’érable se convertit en un vinaigre fort bon… Ce vinaigre est fait à partir de l’eau des dernières coulées. » Aujourd’hui, on fait beaucoup de vinaigre de cidre en Montérégie.  Les autres vinaigres de vin, de riz, de xérès viennent de l’étranger tout comme le vinaigre balsamique qui nous vient d’Italie. Quant au vinaigre blanc que nous utilisons en grande quantité pour les marinades, il est produit par l’industrie qui se sert de copeaux de hêtre ensemencés par la mouche du vinaigre (la drosophile) pour faire de l’alcool de bois. Ce méthanol, au contact de l’air qu’on fait circuler abondamment dedans, comprenant du monoxyde de carbone, se transforme rapidement en vinaigre blanc. Les ainés m’ont raconté qu’autrefois, le vinaigrier était mis sur la table à tous les repas, tout comme la mélasse. Cette coutume remonte au régime français. Sur les bateaux transatlantiques qui ont amené une partie de nos ancêtres au Québec, les soupes de légumineuses étaient mangées froides, les soirs de grand vent, arrosées d’huile d’olive et de vinaigre, car  n’osait pas allumer le feu pour faire un repas chaud. Nos ancêtres ont gardé l’habitude d’arroser leurs salades, leurs légumes et leurs collations vinaigrées. On aimait particulièrement les collations de poisson, de langue, d’œufs, de maïs dans le vinaigre. Au milieu du XIX e siècle, on commençait à faire des vinaigres d’herbes et de petits fruits pour les salades et les boissons rafraichissantes de l’été. On consultera mon 5e volume pour plus de détails, Histoire de la cuisine familiale du Québec, le monde à notre table, ses cuisines et ses produits, de la page 736 à 740.