Les poissons entiers farcis ou non

La grosseur du poisson a toujours eu de l’importance aux yeux des pêcheurs d’origine autochtone ou européenne. Les missionnaires jésuites ont noté, dans leurs écrits, que les gros poissons étaient pêchés, la nuit, avec un dard ou un nikog, à la lumière d’une torche qu’on attachait en avant du canot. C’était un travail d’homme tout comme celui de la pêche au filet qui se pratiquait toujours en groupe d’hommes qui unissaient leurs forces pour ramener le poisson dans la barque. Pourtant, les femmes pêchaient beaucoup aussi, mais sur le bord des lacs, des rivières ou des ruisseaux à l’aide d’une ligne et d’un hameçon. On y mettait aussi des filets qui s’avançaient dans le fleuve ou les cours d’eau que les petites filles allaient vérifier chaque matin avec leur maman. Ces petits poissons faisaient partie du menu d’été. Mais lorsqu’on attrapait un gros poisson, on invitait du monde pour le manger pour ne pas en gaspiller. Le gros poisson était souvent associé à la fête et aux réunions d’amis. Cette tradition autochtone s’est jumelée à la tradition française, au XVII e siècle. Dès le début du Moyen Âge, les « coq » ou cuisiniers des princes farcissaient les gros poissons, lors des banquets offerts à la cour. On le faisait pour des raisons esthétiques car un poisson évidé n’a pas une belle apparence ; son ventre s’affaisse à la cuisson et il perd toute sa beauté. Les cuisiniers eurent alors l’idée de remplir le ventre avec du pain et des herbes pour lui donner un meilleur gout. La tradition est devenue populaire dans toutes les classes de la société, lors des fêtes. Lorsque les Français se sont installés au Québec, ils ont amené la tradition avec eux. Avec le temps, les recettes de farces se sont diversifiées de sorte qu’aujourd’hui, chaque famille de pêcheurs a sa recette préférée. Dans mon enquête, c’est le poisson farci au riz et aux aromates qui remporte la palme. On ajoute au riz des herbes, des légumes au gout pas trop fort pour ne pas altérer le gout du poisson lui-même. Le poisson farci demeure un plat festif d’été, historiquement aussi populaire que le cipâte, en hiver.