Porc
Notre porc est originaire d’Asie centrale d’où sont partis tous nos ancêtres lointains pour envahir l’Europe. Les Celtes, les Germains, les Grecs et les Romains élevaient tous du porc. Mais ce sont les Celtes, ancêtres des Gaulois, qui lui vouaient un véritable culte. Ils laissaient paitre les troupeaux de cochons dans les forêts de chêne autour de leurs villages, où se tenaient leurs prêtres, les druides. Le chêne, l’arbre divin par excellence, nourrissait le cochon de ses glands. Lorsque le premier de l’An celte arrivait, au début novembre, on sacrifiait l’animal avec soin pour le consommer totalement dans un grand repas festif relié à la mythologie celtique. Le cochon était considéré, par eux, comme un animal très intelligent qui savait tirer profit de son environnement tout en s’adaptant au moment présent. Pour acquérir son intelligence, on gardait la consommation de sa tête comme le grand plat festif, par excellence. On la faisait doucement rôtir et on la consommait de façon cérémonieuse. Au début du Moyen Âge, on s’est mis à remplacer les os de la tête par une farce de pain et d’herbes séchées. L’arrivée du christianisme en Europe, à la même époque, ne put empêcher les villageois gaulois de continuer de célébrer le porc, au premier de l’An. On retarda sa consommation festive au Premier de l’an chrétien, qui changea de date, au cours des siècles.
Les Français apportèrent toute cette cuisine festive du porc en Nouvelle-France, au XVII e siècle. Et ils ajoutèrent les créations normandes héritées des Francs et des Vikings, comme le boudin et le porc fumé devenu le bacon et le jambon. On continua, au Québec, de faire les ragouts de pattes de porc, les charcuteries, les rôtis de porc, les saucisses, le boudin, à chaque année, au temps des fêtes annuelles de Noël, du Premier de l’An et de la fête des Rois. J’ai trouvé, dans quelques archives, des témoignages datant des années 1950, qui parlaient de la fameuse tête de porc, encore servie à Québec, sur le Chemin du Roy et sur la Côte-du-Sud, le midi du jour de Noël ou du Premier de l’An. Une dame de Québec racontait que ce repas de Noël au midi était réservé à la famille immédiate, seulement, et qu’on mangeait la tête cérémonieusement, presqu’en silence. Dans la plupart des familles, on commençait le repas par un ragout de pattes de porc, divers pâtés de porc haché, des charcuteries maison comme la tête fromagée, les cretons, les plorines, le boudin, etc. avant de passer à l’oie farcie, autre souvenir de l’époque celtique.
La cuisine du porc est si importante dans la culture des Franco-Québécois que je ne pourrai pas mettre toutes les recettes de porc en une seule fois. J’irai plutôt par type de plats qui s’ajouteront, au fil du temps, à ce réservoir de recettes authentiquement québécoises. On pourra consulter, pour plus de détails, mon 4e volume consacré à l’Histoire de la cuisine familiale du Québec, la plaine du Saint-Laurent et les produits de la ferme traditionnelle, de la page 1027 à 1074, pour en connaître plus sur la cuisine du porc.