La cuisine de la Côte-du-Sud

La Côte-du-Sud est l’ancien nom donné à une partie de la région de Chaudière-Appalaches contemporaine. Elle appartient à la Plaine du Saint-Laurent et va de Berthier-sur-Mer, à l’ouest, à Saint-André-de-Kamouraska, à l’est.

SES GARDE-MANGER

L’ESTUAIRE DU SAINT-LAURENT

L’éperlan et le capelan étaient si abondants autrefois qu’on les ramassait à la pelle dans des tombereaux qu’on renversait ensuite dans les champs ou le jardin. On y pêchait, selon les saisons, de l’anguille, du hareng, de la morue, du flétan du Groenland, de la loche, du saumon, de la sardine, de l’alose, de l’esturgeon noir, de la carpe, de la plie, du bar rayé et de la truite de mer. Et l’on ramassait beaucoup de moules en automne, certains hivers, et au printemps, à travers les glaces. Sur les grèves, on peut toujours chasser les canards marins, les fameuses oies blanches et les outardes.

LA FORÊT APPALACHIENNE

La forêt du Piedmont et des Appalaches donne toujours largement ses truites mouchetées et ses touladis. Le petit gibier, comme la gélinotte et le lièvre, le gros gibier comme le cerf de Virginie, l’orignal et même le caribou des bois, autrefois, occupaient une place importante dans le menu quotidien d’hiver. Jusqu’au milieu du XIXe siècle, la tourte ne donnait pas sa place, non plus, pas plus que les petits oiseaux blancs (bruants des neiges) qu’on servait les dimanches soirs d’hiver,  jusque dans les années 1940. Cet amour pour les oiseaux sauvages remonte au XVIIe siècle où l’on pouvait chasser sur les grèves, des bécasseaux, des bécassines, des pluviers et autres petits oiseaux de rivage qu’on appelait des alouettes ou des ortolans.

LA FERME

Les fouilles archéologiques faites dans la région démontrent qu’au début de la colonie, on consommait surtout du porc et du mouton. Le bœuf et la vache étaient gardés jusqu’au bout de leur âge pour les travaux de la ferme et le lait. On les consommait bouillis ou en rôtis de longue cuisson, en fin de vie. Mais l’enseignement de l’agriculture donné à l’École d’agriculture de Saint-Anne-de-la-Pocatière de même que l’enseignement de la cuisine donné à l’École ménagère de Saint-Pascal de Kamouraska renouvelèrent considérablement l’alimentation de la région. Et cet engouement pour les nouvelles idées fut entretenu par un journal fondé en région, La Gazette de campagne. Ces institutions eurent une importance capitale dans l’histoire de l’alimentation québécoise, comme je l’ai découvert en fouillant dans nos archives.

 

SES FONDATEURS

LES AUTOCHTONES

La région a été fréquentée par les Archaïques maritimes, il y a 9 000 ans, puis par les Archaïques laurentiens, il y a 6 000 ans. Avant l’arrivée des Français, les Iroquoïens venaient chasser le bélouga qui fréquentait les alentours de iles et les embouchures des rivières. Les Micmacs de la Gaspésie et les Etchemins de la Nouvelle-Angleterre traversaient les Appalaches pour venir chasser le gibier réfugié dans les montagnes et le piedmont de la région. Au XIXe siècle, les Malécites, descendants des Micmacs et des Etchemins, fréquentaient la région, au temps de la chasse aux mammifères marins.

LES FRANÇAIS

Les Français sont en fait les premiers hommes à occuper la région de façon permanente. C’est le gouverneur Montmagny qui occupe l’espace le premier quand il se fait construire une ferme sur l’île aux Oies, en 1645. C’est la famille Boissel originaire de Cap Tourmente, l’autre côté du fleuve, qui viendra s’occuper de la ferme. Le premier enfant de la région y nait en 1646. À partir de 1669, quelques colons s’installent avec leur famille sur les rives de la Rivière à la Caille, ancien nom de Montmagny. Plusieurs Français, pêcheurs de métier, vont s’installer dans la région de l’Islet autour des années 1759, parce que le golfe est occupé par les Anglais qui captent tous les bateaux français qui veulent retourner en France.

LES ACADIENS

En 1755, juste avant la déportation des Acadiens, plusieurs Acadiens, comme l’un de mes ancêtres, décidèrent de s’enfuir de leur pays, l’ile du Prince-Édouard, en direction du Québec, par le sentier de la Matapédia. Ils marchèrent à pied, en se nourrissant de gibier ou de poisson, jusqu’aux premiers villages de la Nouvelle-France où ils furent hébergés et accueillis par leurs cousins français.

LES ÉCOSSAIS

En 1760, plusieurs seigneurs de la région décident de retourner en France, après la conquête. Leurs belles demeures sont achetées par des officiers britanniques d’origine écossaise. C’est le cas d’Alexander et Malcom Fraser.

LES AUTRES NATIONALITÉS PRÉSENTES EN PETIT NOMBRE

Plusieurs familles d’origine allemande, belge, italienne, néerlandaise et scandinave se sont installées dans la région, comme cultivateurs, à l’intérieur des terres. Ils sont aujourd’hui complètement intégrés à la majorité francophone. On trouve d’ailleurs certains légumes recueillis dans les jardins locaux qui témoignent de leur influence sur leurs voisins francophones, comme les endives, le chou-rave et le céleri-rave. Mais plusieurs groupes ethniques ont aussi fait des séjours importants dans la région avant de retourner dans leur pays; c’est le cas des Finlandais venus travailler à la construction des chemins de fer à Saint-Rosaire, d’une centaine de Russes venus bucher du bois à Saint-Pamphile.

CONCLUSION : La cuisine de la Côte-du-Sud est certainement l’une des cuisines les plus proches de nos racines patrimoniales. La Société historique de la Côte-du-Sud a publié dans son cahier no 5 de 1972, le genre de menus qui étaient servis, au fil des saisons, dans les familles de Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud, au sud-ouest de Montmagny. Je vous invite à lire ces menus dans mon 4 e volume consacré à la cuisine familiale de la plaine du Saint-Laurent, de la page 83 à 86.