Le radis noir

Les radis sont des plantes cultivées depuis le début de l’agriculture, au Moyen-Orient. Ils se sont donc répandus dans le monde en même temps que le blé et les pois secs. Ils figurent pour la première fois, dans un texte, dans une recette chinoise qui date de 1 300 ans avant notre ère. La cuisine égyptienne des Pharaons les utilisait abondamment; celle des Grecs les considérait comme des légumes prestigieux puisqu’on en offrait, sur des assiettes en or, au dieu Apollon, le dieu de la beauté. L’empereur Néron les aimait particulièrement dans des sauces vinaigrées. Nos ancêtres celtes connaissaient les radis qu’ils avaient amenés avec eux depuis l’Asie centrale, il y a 3 000 ans. Les peuples germains qui ont envahi la France l’aimaient beaucoup aussi tout comme leurs cousins norvégiens et écossais. Les radis qu'on appelait plutôt des raves ont donc été amenés au Québec par les Français; c’est Champlain qui le confirme dès 1619. Les Jésuites qui ouvrirent des missions chez les autochtones du Québec et de l’Ontario les plantèrent dans leurs jardins de mission et le radis fut apprécié des autochtones du pays, à partir de 1658, selon Bailey (The Conflict of European and Eastern Algonkian Culture 1504-1700, 1969.) On sait que les Québécois semaient plusieurs sortes de radis, mais ce sont les rouges qui étaient les plus populaires, selon Pher Kalm qui les a vus dans les jardins de la Nouvelle-France, en 1749. Dans les régions maritimes du Québec, on aimait associer le gout piquant des radis au capelan fumé et séché. Cela ressemble drôlement à la mode actuelle des sushis qui fait la même chose en associant le poisson cru au wasabi qui est apparenté au radis. Le radis noir est celui qui a le gout le plus piquant de tous nos radis. On le conservait tout l’hiver dans les caveaux, à côté des carottes et des navets. Mais on le consommait surtout en accompagnent cru avec de l’oignon dans le vinaigre. À cause de son gout fort, il n’était pas aimé des enfants ni de la majorité. C’est pourquoi sa culture était la coutume de quelques familles seulement. J’en ai trouvé la trace plus importante dans Lotbinière, en Outaouais et dans les Laurentides où il y eut une immigration allemande plus importante. Les descendants anglais lui préféraient le raifort qui jouent un rôle semblable. Enfin, certaines familles de descendance française adoptèrent plutôt le carcajou, cette plante sauvage que les gens du Centre-du-Québec appellent la snicroûte. On râpait la racine de cette plante pour la mettre dans des marinades de concombre, d’oignon ou de tomates vertes. Le radis noir devrait faire un retour en force dans nos habitudes culinaires depuis que le wasabi s'y est fait une place.