La cuisine de l'Abitibi
Son paysage
Saviez-vous qu’auparavant, l’Abitibi faisait partie du Territoire du Nord-Ouest et qu’elle était la chasse gardée de la Compagnie de la Baie d’Hudson? C’est le gouvernement du Québec qui en a fait l’acquisition en 1898, après de longues négociations avec le jeune gouvernement du Canada. On comprend alors pourquoi personne ne s’est installé en Abitibi avant le XX e siècle. Ceux qui l’ont fait sont arrivés par train avec le Transcontinental qui devait relier les Provinces maritimes à l’Ouest canadien. J’ai relevé 2 témoignages de cette longue traversée forestière du Québec avant d’arriver en Abitibi. Le premier date de 1981 et fait partie d’une longue entrevue faite par le petit fils de M. François Cossette déménagé en Abitibi avec sa famille alors qu’il était garçonnet : «Le déménagement s’est effectué au mois de juillet, par train. (…) Le voyage, à partir de Parent, bien, s’est déroulé sans incident jusqu’à Senneterre. À Senneterre, notre gardien, notre frère aîné, nous a dit: Bien enfin, ici, c’est Senneterre et ici, c’est l’Abitibi, Nous sommes en Abitibi! — Ah! C’est ici l’Abitibi?” Bon...(…) en Abitibi, c’était l’épinette noire, de l’épinette noire, et de l’épinette noire! Des deux côtés du train, c’était le même paysage morne, mélancolique, qui portait...qui nous portait déjà à l’ennui. Le paysage était ennuyant! Toujours le même vert, rarement une touffe d’arbres, de feuillus comme le bouleau ou le tremble ou d’autres essences de même espèce. Et franchement, du côté paysage, nous avons été considérablement déçus.» L’autre témoignage date de 2005 et est issu du très beau livre de Pierre O’Neil, Mon beau Far West, chez Libre Expression : «Sur des kilomètres, de Parent à Oskélanéo, la forêt squelettique nous regarde passer. Un incendie de forêt est passé quelques années avant nous et il ne reste rien que ces piquets noirs plantés partout dans la paysage, à perte de vue, dans les ravins, sur les montagnes. J’aurais cru que le feu bouffait tout, mais non. Il est trop pressé. Il bouffe les feuillages et passe son chemin. Les arbres restent debout comme des soldats morts les yeux en l’air. Par milliers. Sur des kilomètres et des kilomètres que le train zigzague un peu nonchalamment, comme en pleurnichant un quelconque ennui.» Deux visions semblables où l’ennui se dessine en vert ou en noir pour celui qui vient du Sud. Mais il peut aussi de dessiner en jaune or comme il le fit pour ma femme et moi qui sommes venus revisiter la région en octobre dernier pour écrire ce livre. Notre émotion était bien différente et toute colorée avec les couchers de soleil rouges et or que nous allions voir après nos journées dans les archives! L’or dominant des plaines ou le jaune brillant des mélèzes nous rappelaient sans arrêt que nous étions bien au pays de l’or! L’Abitibi recèle bien des trésors dans ses profondeurs et il ne faut surtout pas se fier aux apparences! Mais nous y reviendrons plus bas. Commençons par le portrait physique de la région.
Abitibi est un mot algonquien qui signifie «eaux mitoyennes» ou «eaux à mi-chemin ou mi-distance». Pour comprendre l’expression, il faut savoir que les premiers occupants devaient parcourir une longue route entre 2 pôles et que ce lieu représentait le milieu du chemin. Les deux pôles en question était, d’une part, le fleuve Saint-Laurent que l’on quittait par la rivière Outaouais et que l’on remontait jusqu’au lac Témiscamingue, puis jusqu’à la source de l’Outaouais sur les hauteurs abitibiennes, et d’autre part, la Baie James que l’on quittait par la rivière Harricana ou Nottaway (Bell) en remontant vers les Hautes terres de l’Abitibi. La région qui départageait les eaux vers le sud ou le nord était l’Abitibi, au sens propre. Au nord de la ligne de départage des eaux, les lacs sont peu nombreux, mais grands et peu profonds. Le lac Abitibi, par exemple, situé à 265 m d’altitude, fait 535 Km carrés de surface, mais ne dépasse jamais 3 m de profond! Le phénomène est semblable pour le bassin versant de l’Harricana et de la Bell avec leurs 300 lacs. Au sud, les 2500 lacs qui forment le bassin supérieur de l’Outaouais sont, en général plus petits et plus profonds que ceux du nord. Mais les deux versants s’entremêlent et devaient être certainement un casse-tête pour les Amérindiens, les coureurs des bois, les prospecteurs et les premiers colons qui devaient transporter des bagages en canot : les portages étaient longs et pénibles. Plus d’un a raconté qu’on devait marcher dans des terrains marécageux où l’on enfonçait jusqu’aux genoux! Les noms des lacs et des rivières à eux seuls évoquent toute l’épopée des premiers voyageurs amérindiens, francophones autant qu’anglophones : Makamic, Robertson, Loïs, Obalski, Shabogama, La Motte, Kewagama, de Montigny, Lemoine, Okikodasik, Kinojévis, etc. Les 3 consonances linguistiques de ces noms annoncent déjà la base de la cuisine locale.
Mais avant d’y arriver, j’aimerais donner quelques détails de plus sur la structure de la région. Disons tout d’abord, que l’Abitibi est aujourd’hui limitée au nord par le 49 e parallèle, à l’ouest par l’Ontario, au sud par le Témiscamingue et le Parc de La Vérendrye et à l’est par la rivière Bell et le lac Obaska. On compte 150 Km de l’est à l’ouest, , et une centaine de kilomètres du nord au sud. La végétation appartient à la sapinière à bouleau blanc au nord du partage des eaux et au sud, à la sapinière à bouleau jaune, avec quelques rares pins blancs. Près du 49 e parallèle, c’est la pessière qui domine. Chacune de ces forêts recèle des espèces comestibles intéressantes pour l’homme : noisetiers et bleuets au nord, salsepareilles, merises et cerises au sud. L’Abitibi se résume en deux sous-régions différentes : soit les Hautes-Terres au sud où l’eau se départage, avec deux villes minières importantes à chaque extrémité de la région, soit Val-d’Or à l’est et Rouyn-Noranda, à l’ouest; soit les Basses-Terres, au nord, constituées de plaines argilo-sableuses, avec deux pôles agro-forestiers à chaque bout : Amos à l’est et La Sarre à l’ouest. Ces deux sous-régions sont marquées par la présence d’énormes eskers, résidus de la fonte du glacier qui recèlent des quantités incroyables d’eau de qualité exceptionnelle. De jeunes entrepreneurs utilisent cette eau pour faire l’élevage de la truite à Saint-Mathieu d’Harricana et une bière magnifique à Amos qui s’appelle la Taïga. On embouteille aussi de cette même eau pour l’exportation. C’est la nouvelle mine d’or de l’Abitibi!
Son peuplement et ses origines ethniques
Mais avant de venir en Abitibi pour l’or, l’homme est venu d’abord pour l’abondance de la nourriture sur place. C’était la première motivation de l’homme préhistorique! Il se déplaçait pour mieux survivre. La première preuve d’occupation humaine du territoire daterait de plus de 5 000 ans AA. Les premiers Archaîques seraient associés nettement à la culture laurentienne de la plaine du Saint-Laurent plutôt qu’à celle du Bouclier canadien. Les fouilles faites par une équipe d’archéologues au lac Abitibi, en 1993, révèlent qu’ils connaissaient la poterie comme les Archaïques de la plaine laurentienne et qu’ils s’en servaient à leur manière en mettant cuire leurs aliments dans un carré de sable surélevé au milieu de la tente. Les restes culinaires trouvés sur place précisent davantage ce qui constituait l’essentiel de leur diète : brochet, doré, corégone, laquaiche, moules d’eau, orignal, caribou, ours noir, loutre, martre, castor, rat musqué, porc-épic, mouffette, lynx, chien domestique, lièvre, huard, canard noir, garot, morillon à collier et outarde. L’absence de perdrix ou de lagopèdes est étonnante. Ce qui ressort des fouilles, c’est la prédominance du gros gibier avant le poisson et le petit gibier, et le peu de place accordé aux oiseaux dans la diète. Les aliments étaient plus souvent bouillis que rôtis parce qu’ainsi on perdait moins de viande et l’on pouvait nourrir plus de monde.
La première mention historique des Amérindiens de la région remonte à 1640 et 1660. Le rapport du gérant du Poste de traite Onepigon, appartenant à la Baie d’Hudson, dit qu’il y a une centaine d’Abitibis au lac du même nom en 1735. Ces derniers vivent, pendant l’hiver, en allant chasser un peu partout entre la rivière Harricana (Amos) et la rivière Abitibi (Ontario). L’été, ils se regroupent tous sur le bord du grand lac Abitibi. Les Basses et les Hautes-Terres de l’Abitibi actuelle étaient donc leur territoire d’activités. Ils commerçaient avec les Témiscamingues, au sud, et les Cris de la Baie James, au nord. L’été, ils commerçaient aussi avec les Hurons par le lac Opasatica, le lac Des-Quinze et le lac Témiscamingue. Ils se nommaient les Apittipi anissinape, qu’on traduit par «les gens du lac à coloration foncée». C’est la Compagnie de la Baie d’Hudson qui a reconstruit un Poste de traite au lac Abitibi en 1794, suite au départ des Français en 1760. Ce sont surtout des Écossais qui tenaient les postes de la Baie d’Hudson et des Canadiens-français qui tenaient ceux de la Compagnie du Nord-Ouest, sa rivale dont le poste fut ouvert au même endroit, quelques années plus tard. Après la fusion, la compagnie de la Baie d’Hudson continua d’ exercer son influence entre autres à cause du fait que son personnel était surtout composé de Métis écossais. La langue anglaise et la culture celtique allait marquer ceux qu’on appellerait, à nouveau, les Algonquins. La cuisine celtique dont j’ai parlé dans mon premier volume a laissé beaucoup de traces dans la cuisine algonquine actuelle, comme les soupes ou ragoûts épaissis au gruau d’avoine. En 1915, on construisit un barrage sur la rivière Abitibi, en Ontario; ce qui eut pour effet d’éliminer complètement les espaces immédiats du lac Abitibi où se tenaient le castor, la rat musqué, le vison, la loutre, etc. Les Abitiwinis ont donc décidé de quitter l’Ontario pour s’installer désormais dans leur territoire d’hiver au Québec : le gibier et la fourrure y étaient plus abondants, les habitants pratiquaient la même religion qu’eux et le commerce y était plus avantageux. Vers 1950, ils se déplaçaient de La Sarre vers Amos où ils achetèrent une terre de 200 âcres pour y camper. Déjà, un groupe nomadisait sur les rives de l’Harricana et de ses affluents. Ce lieu est devenu la communauté dynamique de Pikogan, en 1955, perçu comme le porte-flambeau de la nation algonquine. Enfin, je veux signaler que Val-d’Or était autrefois, un lieu de rencontre annuel des Algonquins du Grand Lac Victoria et de ceux de l’Harricana. Le lac de Montigny a reçu les visiteurs jusqu’en 1925, au début du village minier. Aujourd’hui, l’administration algonquine du Québec a ses bureaux à Val-d’Or. Les Algonquins y organisent de nombreuses compétitions sportives et font la promotion de la culture algonquine depuis 1980. Mais les choses ont bien changé depuis le début du XX e siècle où le Gouvernement québécois commençait à peine à penser développer la région!
Pour ce faire, il envoya des géologues, des arpenteurs, des ingénieurs qui lui firent plein de rapports positifs sur le potentiel de la région : belles terres agricoles, riche sous-sol en perspective, nombreuses sources d’eau fraîche, abondance de gibier, forêts matures à exploiter, etc. Dès le début du XX e siècle, il avait fait arpenter une cinquantaine de cantons dans la région. C’est le ministre des Terres et Forêts du temps qui décida de baptiser ces cantons du nom des officiers ou des régiments français qui avaient défendu le Québec lors de la guerre contre les envahisseurs anglais en 1760 : Berry, Bourlamaque, Guyenne, La Corne, Languedoc, La Sarre, Launay, Rochebeaucourt, etc. Mais la région demeurait très éloignée de la plaine du Saint-Laurent où se trouvait la majorité des Québécois de l’époque. C’est la construction du fameux Transcontinental qui allait permettre aux premiers colons d’atteindre la région. Ce train qui devait traverser le Canada d’est en ouest, était l’idée de Sir Wilfrid Laurier. Travail colossal entrepris par la compagnie Grand Trunk Pacific Railway et la Commission du National Transcontinental, il a nécessité d’abord la venue de coureurs des bois, d’Amérindiens qui connaissaient bien la région, d’arpenteurs et d’ingénieurs qui prirent des mesures, évaluèrent les pentes, les ponts à faire, les hommes à engager, etc pour réaliser un tel projet. C’est plus de 300 hommes qui ont travaillé sous les ordres de l’ingénieur en chef W. D. Robertson. Les travaux ont commencé en 1906 et sont partis des deux côté à la fois, soit de La Tuque et d’Ontario. On atteignait l’Abitibi en 1909 seulement. Pour établir le tracé, on avait envoyé toute une équipe de coureurs des bois qui étaient allé porter des vivres sur place avant l’arrivée des arpenteurs. Les ouvriers avaient établi plus d’une douzaine de camps qui sont devenus des gares, tout le long du tracé. En général, celles-ci se situaient au confluent d’une rivière importante ou sur la rive d’un grand lac. Ces cours d’eau donnaient évidemment accès au territoire de chaque côté de la voie ferrée. C’est là que les premiers arrivants allaient s’installer pour y pratiquer l’agriculture. Les premiers cependant ont dû passer par l’Ontario parce que le tronçon de l’ouest a été prêt avant celui de l’est; c’était un détour pouvant aller jusqu’à trois fois la distance actuelle pour aller en Abitibi par la voie de l’est : ils devaient se rendre à Ottawa, puis prendre le Canadien Pacifique jusqu’à North Bay, puis le Temiskaming and Northern Ontario Raylway (TNOR) qui se raccordait au Transcontinental à Cochrane, puis revenir vers le Québec par la voie en construction. Par la suite, les nouveaux arrivants s’éloignèrent de la voie ferrée pour chercher un sol plus léger et plus propice à l’agriculture, dans les Basses-Terres de l’Abitibi. Les voies d’eau furent leurs premières routes. Par la suite, on a construit des chemins tout le long de la voie ferrée et perpendiculaires à celle-ci pour accéder aux meilleures terres. Ainsi, en 1921, on rencontrait des colons de Senneterre à La Reine, établis dans une vingtaine de paroisses tout le long de la voie ferrée, dans un corridor qui faisait 15 Km de large. De 1910 à 1921, on était passé de quelques personnes à plus de 13 000 personnes. La majorité des colons vivaient des produits de leur ferme, de la cueillette des petits fruits, de la chasse au petit gibier et de la pêche dans les alentours. Les produits importés étaient achetés avec l’argent gagné par la vente du bois bûché sur la terre, par le travail dans les chantiers ou à la construction des chemins. Je vous donnerai plus bas plusieurs témoignages de l’alimentation et de la cuisine de cette époque des colonisateurs de l’Abitibi. Mais pour l’instant, je veux dresser un portrait plus précis du peuplement du territoire par les Canadiens-français.
Les premiers arrivés auraient été des squatters. On parle de bûcherons installés à Val-des-bois dès 1883, puis de colons venus en 1909 du Nord-Témiscamingue après avoir expérimenté l’Ouest canadien pendant 1 an; les Turcotte de St-Rémi d’Amherst. Heureusement pour nous, l’une des femmes du groupe, Mme Joseph Turcotte, écrivait son journal et je veux absolument vous partager ses notes pour vous donner une idée des débuts culinaires de la région. «Le 24 sept. Poisson pour déjeuner. Le 25: “les hommes préparent un feu pour faire la “bouillotte” tandis que les enfants s’amusent autour des flammes”. Vendredi le 30 septembre: Nous tuons beaucoup de perdrix et voyons des sentiers d’orignaux, ce qui intéresse nos maris!... Jeudi le 6 oct. Les hommes réparent les canots. Les femmes en profitent pour faire cuire du pain dans les poêles de tôle. Samedi le 8 oct. Il a plu toute la matinée. Plusieurs perdrix viennent nous rendre visite et nous leur faisons une belle réception. Nous avons la visite des gibiers à plume et à poil qui règnent en maîtres dans la forêt. Les perdrix abondent. Les enfants qui jouent au grand air viennent souvent nous avertir d’aller les voir, tantôt elles courent par terre, tantôt elles mangent des bourgeons dans les arbres.» D’autres squatters arrivent à partir de 1908 pour s’établir dans le canton de La Sarre, au confluent des rivières La Sarre et Calamité, En 1910, les frères Mathon de Ville-Marie s’établissent sur une pointe du lac Abitibi (Roquemaure). Chacun y est venu pour pratiquer l’agriculture. En 1911, on vient de la Beauce pour fonder Palmarolle. En 1912, on fonde Amos et on défriche Val-d’Or. Par la suite, plusieurs villages seront fondés par des fils de cultivateurs originaires des Comtés de Portneuf, de Champlain, de Nicolet et de Montmagny. Ceux qui sont arrivés les premiers ne l’ont pas eu facile, en particulier ceux qui ont vécu le terrible feu de forêt qui est parti de Cochrane et qui a tout détruit sur son passage jusqu’à Senneterre à l’été 1913. Les bâtisses ayant servi à la construction du chemin de fer, les gares, les moulins à scie, les machines elles-mêmes, tout a été détruit. Plusieurs sont morts, la plupart ont tout perdu et les survivants ont dû se réchapper la vie en fouillant dans les décombres, Je vous livre le témoignage de M. Ménard de Senneterre qui a lui-même vécu l’événement en 1913. «Pis là, on n’avait rien à manger, on ne savait pas quoi faire. Ça fait qu’on s’en vient icitte, puis on s’en va à l’ancien hôtel Saint-Denis. Le poêle était sur le côté. J’ouvre le fourneau: y avait une grande casserole à la grandeur du fourneau. Y avait des moyens pains que la femme avait mis dans le fourneau pour les faire lever avant de les faire cuire, juste avant le feu. À notre grande surprise, ces pains avaient cuit juste à point dans le feu de forêt. Y avait quelques pains qui avaient brûlé un petit peu dans le bord de la porte. Le restant était beau, d’un beau jaune comme de l’or. Ensuite, on s’en va fouiller dans les glacières de Saint-Denis. À une place, on frappe une slap de jambon à peu près ça de long. Ah ben! on est pas stock, étoile! Bon, à c’t heure, on va aller à la compagnie Rochette qu’on a travaillé pour. Y avait une glacière, là aussi. On a trouvé un baloney, pis des poêlonnes; y en avait quasiment pour charger un char. J’ai dit:, à c’t heure on va aller chez Flegman. Y avait une pile de caisses de can goods, c’était tout’ versé à terre. Les femmes ont dit: “C’est tout’noirci.— Ben, j’ai dit, ça fait rien, on va trouver quelque chose là-dedans. Tiens, une canne de bleuets, ici. Pas une graine de mal. Tiens, une canne de fraises, là. On se ramasse une canne de lait. on va aller manger. On s’en est allé là-bas, puis on a ramassé des poêlonnes, des couteaux. Y en avait aussi en masse. On ramassait tout ce qu’on avait besoin, c’était pas gênant, puis on a bien mangé.» L’été 1915, l’Abitibi recevait ses premiers trains de déménagement par le côté est de l’Abitibi. Deux villages se sont ouverts, cette année-là : Belcourt et Saint-Marc-de-Figuery. L’hiver suivant, le Gouvernement fédéral décidait d’accorder deux trains hebdomadaires pour les vivres et les passagers pendant l’hiver. Cette décision donnerait un coup de pouce à la colonisation qui augmentait d’année en année. Je vous donne le témoignage de Mme Joséphine St-Amant qui nous parle de son travail de fermière et de la nourriture de cette époque : «Je travaille dans la maison avec ma mère, je fais à manger... Je faisais des pâtisseries, des patates fricassées, des grosses soupes, ça n’en prenait beaucoup, on était une grosse famille; on mangeait des bonnes grillades de lard salé, des bonnes “binnes” on se nourrissait bien... Dans l’été j’ai connu mon 2e mari. Il demeure à Lamotte. Je le marie en 1920. Il y a encore des Indiens, on fait des échanges: orignal contre du sucre ou de la graisse. On se faisait faire des mocassins. (...) Une de mes journées à la maison: je me lève vers six heure et demi, sept heure, je vais faire le train à l’étable; cinq, six vaches; un cheval, je les soignais (nourrissais) attelais le cheval. Je retournais à la maison pour le déjeuner qui se composait de gruau, toasts ou oeufs selon le désir des enfants, je préparais leur lunch et ils partaient pour l’école. Après leur départ, je retournais à l’étable pour finir mon “train”, tirer (traire) les vaches, faire boire les animaux au lac. (…) Comme on parle de conserver nos affaires, l’hiver ça allait toujours, mais l’été, on s’était creusé un grand trou, six pieds de creux, pas loin de la maison, on mettait un beau gros panneau bien épais par-dessus. Dans ce trou, on mettait notre beurre qui était dans des jarres de grès, on perçait des trous dans le beurre, on vidait de la saumure dessus (eau et sel) et on r’mettait le couvercle de grès. Ça se conservait tout l’été. Quand l’hiver prenait, j’avais tout le beurre qu’il me fallait.» Les gens avaient conservé leurs habitudes fermières de la Plaine du Saint-Laurent. Et ces habitudes perdureraient fortement dans les villages agricoles de l’Abitibi jusqu’au moment de l’arrivée massive des immigrants et des mines dans la région. Pour l’instant, malgré une grande fébrilité dans le monde des prospecteurs, on continuait à penser agriculture. On continuait à ouvrir des paroisses et a en grossir d’autres. En 1922, les premiers habitants commençaient à affluer à Rouyn. Normétal attirait ses premiers mineurs en 1923. Rouyn avait une quinzaine de familles en 1925 mais plus de 300 prospecteurs et mineurs fouillaient le sous-sol, partout le long de la fameuse faille minéralogique des Hautes-terres de l’Abitibi! Mgr Tessier, qui fut le premier curé de Rouyn, raconte comment il s’est débrouillé pour vivre, à son arrivée à Rouyn : « — Oui et monsieur Doyon fut ma “ménagère”. Lorsque les représentants du Département des garde-feux sont venus, ils m’ont offert, puisque mon salaire n’était pas très élevé, de me nommer garde-feu. On me promit des gages et je reçus une “badge” ainsi qu’un canot à moteur afin de pouvoir, tout comme mon compagnon, faire la tournée des lacs et surveiller les feux de forêts. — L’heure de la dîme n’étant pas encore sonnée, votre salaire de garde-feu suffisait-il? — Mon compagnon voyait aux provisions. Ce n’était pas compliqué vous savez: le midi, on mangeait du bacon et des oeufs et le soir, des oeufs et du bacon. Il y avait des conserves, mais ça coûtait les yeux de la tête! prenez par exemple, les simples biscuits Village; ils coûtaient $0.80 la livre. Tout était à l’avenant. Le prix de transport était de $3.00 le 100 livres, à partir d’Angliers jusqu’ici; et les navigateurs les gagnaient bien! En plus de naviguer jour et nuit, ils devaient aux rapides décharger la moitié du stock, attacher le bateau avec un câble après un arbre, aller prendre du matériel pour le portager. changer d’embarcation, charger de nouveau et reprendre la route. — À l’automne, ce devait être plus hasardeux à cause des glaces. — Oui, il fallait prévoir pour les provisions d’hiver; ces gens-là y pensaient deux fois d’avance. — Heureusement que vous pouviez vous rabattre sur le gibier de la forêt! — Oh la la! Vous croyez ça? Lorsqu’on commence le dynamitage, les animaux sauvages fuient vers des endroits plus paisibles et plus sûrs; de même, pour les poissons, avec l’installation des moulins à scie et les mines qui polluaient par leurs déchets toute l’eau du lac, leurs chances de survie devenaient impossibles.»
Les mines attiraient non seulement les immigrants mais aussi les Canadiens-français de la Plaine du Saint-Laurent. Mais souvent, cela prenait beaucoup de temps entre la découverte de la mine et son ouverture officielle qui pouvait permettre aux mineurs de gagner leur vie. Les hommes allaient donc bûcher en attendant, ils travaillaient à faire des chemins ou à construire les infrastructures préliminaires à l’ouverture des mines. Des fils de cultivateurs arrivés dans les années 1910 venaient chercher du travail plus rémunérateur dans les services de ces nouvelles villes minières qui poussaient comme des champignons. M. J. M. Marchand de Rouyn nous raconte cette époque : «Mon père était monté à Amos en 1912 et sa famille, l’année suivante. (...) De 1928 à 1931, j’ai travaillé pour M. Krattiger et je me suis marié. Sept mois plus tard, j’ai ouvert à mon compte un petit restaurant avec atelier de barbier, coin Principale et Tessier. Je vendais surtout de la liqueur et des hot-dogs... à cinq cents; il fallait vendre 100 bouteilles pour mettre $5.00 dans la caisse.» La crise économique de 1929 amena beaucoup de gens en Abitibi. Le boom minier attira un certain nombre d’hommes qui n’avaient pas peur de descendre dans les mines : ce fut le cas en 1929 à l’Île-Siscoe et à Taschereau. Puis la même chose en 1930, à Évain, puis à Saint-Guillaume-de-Granada fondé par des gens de la région d’Ottawa. Même chose encore à McWalters en 1932, à Roc-d’Or, Sullivan et Bourlamaque en 1934, Mallartic en 1936. Dubuisson en 1937, Cadillac en 1940. Le nombre important de chômeurs à Montréal et partout au Québec incita le gouvernement provincial et fédéral à faire quelque chose. Il y eut donc le Plan Gordon à Ottawa et le Plan Vautrin à Québec. Beaucoup de villages abitibiens, éloignés de la voie ferrée, au sud ou au nord, se sont ouverts à cette occasion et ont donné un deuxième souffle à l’agriculture abitibienne. Plusieurs des personnes originaires des villes ne connaissaient absolument rien de l’agriculture et ils crevaient littéralement de faim. M. Vautrin lui-même, en visite sur place, avait pu le constater. Voici le souvenir de M. Poirier de Senneterre : «Dans le “Petit Montréal”, c’était un terrain pour l’orignal. Dans ce temps-là, il y avait beaucoup d’orignaux; on en voyait partout. Le même monsieur Vautrin, en 1933 ou 34, était venu se promener ici. Alors Vautrin pour faire son fin, dit aux gens : “Tuez-vous des animaux et mangez! ” car ils étaient en train de mourir de faim, ces gens-là. Alors un M. Parent dit à M. Vautrin: “ Vous êtes ben fin, mais comment faites-vous pour poigner un orignal pas de fusil, vous? On n’a pas de fusils, on n’a pas de cartouches et on n’a pas d’argent.” Alors M. Vautrin est resté froid un peu, sur le coup. Et après ça, il a pris le train et est descendu à Québec, puis il a envoyé trois fusils, un à M. Parent, et un à deux autres familles— je ne me souviens pas desquelles — pour qu’ils se tuent des orignaux. C’étaient des fusils 20. Que le diable emporte les histoires des lois de la chasse et de la pêche, tuez-vous des orignaux. Il y avait de l’orignal en masse.(…) Alors les gouvernements contribuaient chacun dans une proportion de 40%, ce qui faisait 80%, et la municipalité contribuait, elle, dans une proportion de 20%. Après ce programme de travaux de chômage, la situation ne s’était pas améliorée et il n’y avait plus de travaux à faire, alors les gouvernements ont décidé de distribuer des secours directs. Il y avait des gens appointés pour parcourir les rangs et prendre les commandes des provisions des colons. Mais il était bien convenu qu’on ne pouvait pas mettre sur la liste des commandes, n’importe quoi. Il fallait se limiter à des choses absolument essentielles, de la nourriture indispensable.(…) Dans la nourriture, on n’avait pas le droit de prendre des commandes de sirop: il fallait remplacer ça par de la mélasse. —La mélasse était acceptée? —La mélasse était acceptée. Pas de confitures. Il fallait que ce soit des choses absolument essentielles, Pas de luxe, pas de galettes... —C’était tout simplement pour être certain que les gens puissent manger suffisamment? —Juste manger: pas de viandes dispendieuses, pas de steak; du boeuf et des viandes non dispendieuses. —Des “beans” en masse? —Ah oui, des beans en masse, du “baloney” et de la saucisse, ça c’était bien autorisé.» Et le témoin continue plus loin en évoquant le fait qu’on essayait de vendre tout ce que la ferme pouvait donner pour avoir un peu d’argent liquide : «—Non. bien sûr, c’était au printemps et à l’automne. Et puis elle (une institutrice de ses amis) m’a dit qu’il y avait de ses élèves qui se nourrissaient avec des sandwiches faits de pain, de beurre et de carottes. Elle leur a demandé:”Vous avez des oeufs; comment se fait-il que vous n’en mangez pas, alors que vous avez des volailles?” Alors ils ont répondu:”Les oeufs, il faut les garder pour les vendre pour s’acheter du linge.’ En effet, ils n’auraient pas pu s’en acheter autrement.» Les gens débrouillards réussissaient plus que les autres même s’ils venaient de la ville. Voici un portrait de la cuisine dans les villages de colons abitibiens. D’abord, les souvenirs de Mme Marie-Anne Gosselin : «Mon pain, je le faisais dans une grosse boîte à fromage rond, c’est ce qui me servait de huche, faut pas oublier qu’on est 11 à table...(,,,) On a mangé de l’orignal, on l’achetait des Sauvages. Dans ce temps-là, ils avaient le droit de chasser n’importe quand. Ils nous vendaient une fesse $5.00 et on l’accrochait dans les arbres. J’ai jamais mangé de lièvre. Ceux que les enfants prenaient, c’était pour vendre. J’ai mangé du lapin, on s’était gréé de lapins. À Pâques, je farcissais un beau lapin. Les animaux augmentent, des vaches, on va à la crèmerie, une beurrerie à Amos, on envoyait la crème dans des bidons. (…) Je cuis 2 fois par semaine et pour ménager le pain je fais des crêpes le matin. Le soir, les enfants soupaient au pain et au lait, surtout après qu’on a eu une vache. Imaginez du pain chaud avec du bon lait frais. Le vendredi, il fallait que je leur fasse une bouillie: c’est du lait qu’on épaissit avec de la farine, on verse cela dans des assiettes pour le faire refroidir et on le sucre avec de la cassonade, on appelait cela de la bouillie.» Je vous donne aussi quelques plats familiaux pratiqués par des gens de La Motte dans les années 50. «Je me souviens du bon pain qu’elle faisait, du beurre, des tartes et poudings aux petits fruits des champs, des galettes et des crêpes faites au lait de beurre. Nous n’étions pas riches, mais nous mangions bien» «Le dimanche, la maison devenait le lieu de rencontres bien anodines des amours interdites des Meilleur, Michaud, Mayrand, Desnommé, etc. Ça se terminait toujours de la même façon: papa invitait tout le monde à dîner, maman mettait la table et papa cuisait des petits steaks tranchés mince, avec une sauce dont lui seul avait le secret, au grand plaisir des enfants qui aimaient bien ce joyeux rituel dominical.» «La Motte (…),c’était Jules St-Amant qui, avec sa gentillesse et sa timidité naturelles, venait offrir ses prises d’esturgeon et de doré frais avec lesquelles les mamans nous faisaient un festin» Les Canadiens français constituaient 86.2% de la population en 1951. Le 13.8% qui reste était composé d’immigrants nés principalement en Europe de l’Est. Nous allons maintenant parler d’eux.
Les premiers sont arrivés dans le nord de l’Ontario pour travailler dans les mines après la Première Guerre mondiale. Ils fuyaient une Europe dévastée à reconstruire. Lorsqu’on a commencé à construire le Transcontinental à partir de Cochrane, plusieurs ont décidé de tenter leur chance au Québec en venant travailler dans la mine de Rouyn-Noranda. Par la suite, certains s’établiraient encore plus à l’est, à Val-d’Or. Les immigrants et les Canadiens-anglais constituaient une part importante de la population des villes minières en 1931; celle-ci atteignait les 50% à Rouyn-Noranda. Les proportions allaient être semblables à Val-d’Or lorsque les mines d’or commenceraient leurs activités à l’hiver 1934-35. En 1931, les immigrants constituaient 7% de la population totale de l’Abitibi; et la proportion était descendue à 5% en 1951. À Rouyn et Val-d’Or, leur présence était très visible. Quand on marchait sur la rue, on entendant parler des dizaines de langues différentes, on trouvait de nombreux produits inconnus dans les épiceries, on voyait plusieurs centres communautaires fréquentés par différentes ethnies, on voyait de nombreuses confessions religieuses et des associations politiques totalement opposées à l’intérieur des mêmes ethnies : c’était l’Europe des années 30 en raccourci!
Voici par ordre décroissant, les communautés ethniques les plus importantes de l’Abitibi, dans les années 30 : les Polonais (354), les Finlandais (294), les Scandinaves (270), les Autrichiens (256), les Ukrainiens (230), les Italiens (225), les Allemands (174) et les Tchécoslovaques (156). Après la 2 e Guerre mondiale, on se retrouvait avec une pénurie importante de main d’ouvre dans les mines. Les compagnies sont donc parti faire du recrutement en Europe. Cette fois-ci, on choisissait son monde : on voulait des jeunes hommes célibataires, déjà formés techniquement, et sans dossier politique ou syndical. On se rappellera ici que la première grève de la Noranda en 1937, avait été menée par un groupe d’immigrants qui avait, soi-disant, des sympathies communistes. Par conséquent, on se méfiait désormais beaucoup des têtes fortes. C’est ainsi qu’on vit arriver une autre vague importante d’immigrants qui allaient grossir les diverses communautés déjà présentes de façon significative. En 1951, les groupes précédemment nommés avaient tous augmenté leur nombre : les Polonais étaient rendus 1 510, les Ukrainiens 884, les Italiens 537, les Allemands 504, les Tchékoslovaques 350, les Finlandais 343, les Scandinaves 302 et les Autrichiens étaient les seuls qui avaient diminué en nombre avec seulement 43 personnes. Si on ajoute les autres communautés présentes en Abitibi, on était rendu à 10 500 immigrants en Abitibi - Témiscamingue. Ces gens se réunissaient par affinité religieuse, linguistique ou politique. On organisait des pique-niques, des danses sociales, des groupes de musique, des associations sportives, des groupes d’entraide et des cours de langue. J’aimerais maintenant donner quelques précisions sur certains groupes qui m’ont été fournies par des témoignages compilés aux Archives nationales du Québec à Rouyn-Noranda.
Le second groupe en importance en Abitibi, après les Canadiens-français, étaient les Canadiens-anglais qui comptait pour 13% de la population totale en 1941. Ils constituaient même 40% de la population de Noranda et Bourlamaque
Après eux, venaient les Polonais qui avaient leur salle communautaire à Rouyn et à Val d’Or. Une grande partie des Polonais d’Abitibi est arrivée en 1948. Pendant 6 mois, ils étaient initiés au métier de mineur par des anciens immigrants polonais arrivés dans les années 20. Puis ils étaient jumelés à un mineur canadien-anglais ou canadien-français bilingue. On fêtait toujours la fête de Noël et de Pâques à la salle communautaire polonaise. Leur présence est encore perceptible aujourd’hui car on peut trouver des charcuteries polonaises dans quelques épiceries de Rouyn. Les grands classiques de la cuisine polonaise sont assez souvent pratiqués par certaines familles et les soupes au chou et aux betteraves y sont bien connues. D’ailleurs, la cuisine polonaise a beaucoup de recettes communes avec les autres pays d’Europe de l’Est que nous allons bientôt nommer.
Viennent ensuite les Ukrainiens. Les premiers ne sont pas venus comme mineurs mais comme fermiers. Une trentaine de familles suivirent le père Josaphat Jean, prêtre catholique de rite bysantin, né à Saint-Fabien-sur-mer près de Rimouski. Ils se sont installés au lac Castagner de 1928 à 1935. Le village ruthène s’appelait Sheptytsky.. Mais beaucoup d’Ukrainiens ont quitté leur village pour aller travailler dans les mines qui ouvraient à Rouyn-Noranda et à Val-d’Or. D’autres sont venus les rejoindre; on comptait 884 Ukrainiens en 1951. Les fermiers ruthènes avaient beaucoup d’expérience en agriculture et ils réussissaient mieux que beaucoup de Québécois montréalais qui n’avaient jamais trait une vache de leur vie! Et c’étaient des gens vaillants. Beaucoup de femmes ukrainiennes installées dans les villes minières ouvraient des maisons de pension pour les immigrants. Elles étaient d’excellentes cuisinières, faisaient d’excellents bortsch avec des betteraves, Elles faisaient aussi la version ukrainienne de piroguy polonais, les varenykys, des espèces de petits chaussons de pommes de terre en purée. De plus, les Ukrainiens aimaient beaucoup la musique et la danse, et la vodka! Les Ukrainiens de la première époque allaient pêcher sur le lac Osisko, Ils devaient faire cuire leur brochet ou doré en soupe avec des légumes, ou au four avec des champignons, du fromage blanc et du jus de citron. Comme la pêche sous la glace était appréciée d’eux aussi, peut-être aimaient-ils consommer, comme chez eux, le studynets (poisson gelé). Je sais que les Ukrainiens mangeaient aussi de l’orignal ou du lièvre occasionnellement. Mais le plat le plus typique que les Québécois ont emprunté à leur cuisine, est certainement les choux farcis aussi appelés les choux-cigares.
La communauté la plus proche des Ukrainiens orthodoxes étaient les Russes. L’église orthodoxe de Rouyn recevait aussi les Biélorusses, les Roumains et les Serbes. Plusieurs femmes russes tenaient aussi des maisons de pension pour les travailleurs célibataires slaves. Elle leur faisait une cuisine simple commune à tous les pays slaves : la soupe au chou, aux betteraves , aux cornichons, les crêpes de sarrasin, les boulettes de viande hachée avec la sauce aux champignons, et toujours un peu de crème sûre un peu partout.
Les Biélorusses, plus souvent appelés les Russes blancs par nos parents s’entendaient bien avec les Ukrainiens nationalistes. Ils n’avaient pas de salle attitrée comme les autres groupes, n’étant pas assez nombreux; ils se réunissaient dans les maisons privées et se recevaient, tour à tour, les uns les autres, pour partager un repas ou un pique-nique à l’extérieur. Ils aimaient beaucoup, à ce moment-là, manger du pain avec des charcuteries de porc ou des œufs durs avec de la bière ou de la vodka. La pomme de terre appelée boulha par eux était tout aussi populaire que le porc. Ils l’aimaient en galettes de purée mélangée à des champignons revenus avec de l’oignon au beurre. Et les Biélorusses âgés aimaient aller aux champignons en forêt. L’Abitibi forestière en cachait et en cache encore de grandes quantités!
Parmi les autres groupes slaves, il y avait les Slovaques. Ces derniers de religion catholique fréquentaient volontiers les Polonais et les Ukrainiens catholiques. Les Slovaques ont commencé à immigrer au Canada après la Première Guerre Mondiale. Ils sont, pour la plupart, arrivés du nord de l’Ontario, vers les années 1930. Ils étaient une vingtaine de familles à ce moment-là. La plupart était des fils de fermier et venaient d’un peu partout en Slovaquie. Ils étaient habitués de vivre dehors au grand air. Ils ont dû trouver très difficile de vivre sous la terre comme mineurs! C’est pourquoi, ils profitaient de leurs jours de congé pour organiser des pique-niques appelés opekacka ou repas sur un feu de camp, au lac Rouyn, au début, puis au lac Osisko. Avec les Tchèques, ils constituaient un groupe de 350 personnes en 1951. Les Slovaques ont leur pâtes préférées, les halusky, comme d’autres Slaves ont leur galushka ou leurs galusky. Il s’agit de mélanger de la farine avec des pommes de terre râpées, des œufs et un peu de lait et de les faire cuire comme des gnocchi ou des pâtes alimentaires. On les mange avec du bacon et du fromage blanc ou mieux, avec du fromage de chèvre ou de brebis, comme en Slovaquie. On mange aussi beaucoup de pommes de terre avec des champignons sauvages comme des bolets. Une recette slovaque? Un gratin de pommes de terre et de tranches de bolets frais embeurrés, salés et poivrés et cuit à l’étouffée au four. Il y a plein de bolets en Abitibi! Si vous rencontrez des Pauk (prononcer Pawuk), des Drmay (prononcer Dermay), Lacko, Gerkel, Dobransky, Halajko, Stefunko, Lukach, Muravsky, vous saurez qu’ils ont sans doute vécu à Rouyn.
Ceux qu’on a appelé les Yougoslaves après la 2 e Guerre Mondiale formaient des peuples bien différents les uns des autres auparavant. Leur indépendance récente vient confirmer cette différence culturelle importante entre eux. Or, les Croates, les Serbes, les Slovènes sont venus en Abitibi. Les Croates, un peu plus nombreux, avaient leur salle communautaire à Rouyn (Croatian Hall). Eux aussi organisaient des repas communautaires où leur cuisine était à l’honneur. Je pense à leurs plats tout en un, composés de poisson local (doré ou brochet) ou de viande ou gibier en petits dés, cuits à cru, en couches, avec des pommes de terre ou du riz, des oignons, des tomates, des poivrons verts, du bacon, parfois des aubergines en saison comme le kasapsky djurec, des petites saucisses de bœuf aromatisées à l’ail, thym et Cayenne qu’on mange avec des oignons verts et des piments forts marinés (cavapcici : prononcer tchévaptchitchi). La cuisine croate est un mélange de cuisine slave, méditerranéenne et ottomane. On y fait des légumes farcis (chou, aubergines, tomates ou poivrons) ou des légumes méditerranéens (aubergines, courgettes, poivrons, tomates) préparés en salade ou en compotes chaudes ou tièdes, des grillades sur feu de bois comme les cavapcici mentionnés plus haut, des burek à la pâte filo comme les Turcs ou les Grecs, (chaussons au fromage), sans oublier le sampita qui est un gâteau doré recouvert d’une meringue italienne aussi épaisse que le gâteau. En terminant, je vous donne quelques recettes des autres communautés de l’ex- Yougoslavie qui étaient faites sans problème à Rouyn en les adaptant un peu aux conditions locales. Le gâteau serbe aux noix était très populaire et se pratique encore communément dans les familles. Chez les Serbo-québécois, on aimait la truite de ruisseau enrobée de farine de maïs et simplement poêlée, on faisait des piques-niques avec du pain de maïs et de blé (proja), des oignons crus, du fromage de brebis semblable au feta et du saucisson de porc piquant. Une salade de chou, de laitue ou de tomates servait d’accompagnement à tout cela. L’hiver, on remplaçait ces salades par une salade de chou plus consistante qui incluait du chou, des tomates et du fromage (šopska salata). La cuisine slovène est un mélange de cuisine slave et autrichienne. On aime beaucoup la charcuterie comme la kranjske kolbase, les soupes aux haricots, à l’orge ou aux champignons. Les poissons du lac Osisko les petites truites de ruisseau étaient bien appréciés par les Slovéno-québécois : on les poêlait simplement pour les manger avec des pommes de terre, du chou ou des petits choux de Bruxelles et des betteraves. Et les viennoiseries (brioches) sont aussi très populaires chez les Slovènes.
Signalons maintenant la présence d’autres slaves habitant au bord de la mer Baltique, comme les Lettons. Les renseignements suivants viennent de Roberts Gravitis et Augusts Reiss de Rouyn. «Le premier Letton est arrivé en mars 1948. Ce sont d’abord des chefs de famille et des célibataires qui sont venus. À l’automne et pendant l’hiver suivant, ils ont fait venir leur famille s’ils pouvaient faire la preuve qu’ils pouvaient subvenir à leurs besoins. Autour des années 50, il y avait 100 familles lettones à Rouyn. Il y avait une école lettone, au début. En 1986, il restait seulement 23 familles lettones à Rouyn-Noranda.» Les Lettons pratiquent une cuisine simple très proche de la cuisine celte très ancienne. Eux aussi font la soupe aux pois avec un morceau de porc comme les oreilles ou les pattes de porc. Eux aussi font la soupe à l’orge, mais ils lui ajoutent des champignons sauvages. Les charcuteries servies avec du pain, du fromage et des salades font souvent les pique-niques ou les repas du midi, pris sur le pouce. Je ne voudrais pas oublier de vous citer une recette lettone typiquement nordique, le jus de bouleau (bëfzu sula) qui est fait à partir d’écorces de bouleau qu’on fait fermenter dans de l’eau. Je me souviens avoir vu du vin de bouleau dans mon Saguenay natal!
N’oublions pas les Lituaniens de la mer Baltique et près de la Mer noire, les Bulgares et les Roumains. En 1937, un journaliste du Devoir, Émile Benoist, signalait sa surprise en apprenant que la population de Val-d’Or avait élu un Bulgare comme maire, Dimitri Chalykoff, alors que 80% de la population était franco-québécoise. C’est que beaucoup d’immigrants se sont impliqués dans tous les secteurs de l’activité abitibienne. La cuisine bulgare, quant à elle, ressemble beaucoup à la cuisine grecque que nous connaissons bien, aujourd’hui. Dans les faits, il s’agit plutôt de la cuisine léguée par l’empire ottomane au XIX e siècle. Les légumes précités, l’agneau, le fromage féta, le miel, la pâte filo font partie de cet héritage La cuisine lituanienne aime le gibier et le poisson, Autrefois, elle utilisait beaucoup de produits salés ou fumés comme tous les pays nordiques. Comme partout chez les Slaves, on aime les légumes d’hiver comme les pommes de terre, le chou, les betteraves, mais aussi les champignons sauvages et les confitures aux petits fruits des champs ou des forêts. Les Slovènes se sentent donc chez eux en Abitibi. Je retiens le pouding aux atocas parfumé au clou de girofle, les carrés de pommes de terre râpées mélangées à du bacon et du lait en conserve cuit au four, les champignons sauvages à la crème sûre, tous des éléments qui enrichissent le patrimoine culinaire québécois. La cuisine roumaine de son côté comme la cuisine bulgare, a été marquée par la cuisine ottomane (de l’empire turc) : les légumes méditerranéens, le fromage de brebis, la pâte filo, l’huile d’olive sont présents partout. Ce qui fait qu’il était plus difficile pour les gens originaires de ces pays de cuisiner avec les produits locaux de l’Abitibi. Les ressortissants de ces pays ont dû modifier leurs habitudes alimentaires plus qu’ailleurs. Retenons toutefois pour les Roumains, les nombreuses utilisations de la semoule de maïs pour faire la mamaliga, sorte de polenta ou sagamité algonquine présente en Abitibi depuis le XV e siècle. De plus, il était facile d’acheter de l’agneau en Abitibi puisque les cultivateurs locaux en élevaient pour la laine plus que pour la viande. Beaucoup d’agneaux étaient mis sur le marché, le printemps, et les Roumains et les Bulgares étaient particulièrement amateurs de cette viande pour faire la ciorba (soupe à l’agneau au riz avec un jaune d’œuf et de l’oignon vert haché) ou le stufato (ragoût d’agneau au four). On achetait aussi du veau de printemps que les cultivateurs ne voulaient pas garder sur leurs fermes, pour en faire des ragoûts avec des légumes (ghiveciu).
J’aimerais signaler aussi la présence des Juifs en Abitibi. Plusieurs sont venus d’Europe de l’Est, en particulier de la Russie et de la Pologne, comme les ethnies que nous venons de décrire. Mais ils sont arrivés d’abord dans le nord de l’Ontario avant d’aboutir en Abitibi. La plupart étaient des commerçants (pharmacies, magasins à rayons, cinémas). Dans les années 1940, on comptait une quarantaine de familles juives dans les deux villes minières importantes. Elles avaient même leur rabin, M. Katz, et leur synagogue à Noranda. Leur cuisine était nettement slave avec le remplacement du porc par le canard et l’oie domestiques. Le fameux smoked meat si populaire au Québec avec son pain de seigle, sa moutarde et son cornichon sûr vient de la communauté juive des pays de l’Est.
Après les immigrants slaves, vinrent les immigrants scandinaves. Les plus nombreux furent les Finlandais (660 en 1941). Ils avaient aussi des lieux de rencontre : le Finn Hall à Rouyn, le Finnish Labour Temple à Val-d’Or et le Finnish Club qui dura de 1926 à 1948. Plusieurs Finlandais partageaient l’idéal communiste et s’organisaient pour rencontrer des gens qui partageaient cette idéologie comme certains Ukrainiens. Les Finlandais étaient réputés pour aimer les pâtisseries et ils étaient de grands acheteurs de beignets au miel, aux dires d’une jeune vendeuse de beignes de l’époque. «Les Finlandais ont commencé à arriver à Noranda en 1925. La majorité d’entre eux étaient fermiers en Finlande et cherchaient un meilleur moyen de gagner leur vie à l’étranger. Ils venaient de toutes les parties de la Finlande. Les hommes ont travaillé ici aux mines et comme prospecteurs. Il y eut aussi quelques travailleurs autonomes comme des gens qui ont tenu des pensions, des restaurants, des saunas, des contracteurs en construction et des épiciers. Les femmes célibataires travaillaient comme serveuses ou comme cuisinières dans les maisons de pension. (…) Le moment où la population finlandaise a été la plus nombreuse correspond aux débuts des années ‘40 où ils étaient de 200 à 250 personnes (à Rouyn seulement).
Les mines ont aussi reçu des Suédois et des Norvégiens. Ils étaient 270 en 1931, 430 en 1941 et 302 en 1951. Mais c’est surtout en forêt, comme bûcherons, qu’on en rencontrait. Ils connaissaient bien le gibier et le poisson d’ici puisque la nature de leur pays ressemble beaucoup à celle de l’Abitibi. L’orignal en particulier était bien estimé d’eux et ils avaient l’habitude de le consommer avec de la gelée ou confiture d’airelles, appelées lingon, chez eux. Le brochet était aussi souvent préparée en soupe parce que plus facile à manger à cause des arêtes. L’aneth parfumait cette soupe et la crème sûre lui donnait la touche finale. Mais la plupart de ces scandinaves s’ennuyaient de leur hareng quotidien. Heureusement, les Québécois anciens partageaient ce goût pour le hareng salé, particulièrement les colons abitibiens qui venaient de la région de Montmagny. Ils le faisaient mariner dans le vinaigre avec de l’oignon ou ils en faisaient des salades avec des pommes de terre, des oignons crus et des betteraves.
Parmi les autres groupes ethniques qui font partie des plus nombreux, il faut parler des Allemands. Les premiers sont arrivés d’Allemagne de l’Ouest, à partir de 1930. En 1952, ils étaient 504 mineurs. Ils venaient de Berlin, Mainz, Baden Baden, Dusseldorf, Marienburg, quelques-uns de Bavière et quelques autres d’Autriche. En 1931, ils étaient 256. Mais en 1951, il n’en restait plus que 43. La plupart étaient à la recherche des grands espaces et ne venaient pas vraiment pour des considérations économiques comme plusieurs autres immigrants En plus de la légendaire choucroute, ils nous ont fait connaître les tartes et les gâteaux au fromage, mais surtout, ils sont les inventeurs du hot-dog et du hamburger. Quoi dire de plus!
Parmi ceux qui ont le plus servi culinairement la communauté des villes abitibiennes, il faut parler des Chinois. Nommons Dick Woo avec son restaurant Radio Grill, Jimmy Kwans avec le restaurant Hollywood, les frères Chan avec le Royal café, Bill et Betty Fong avec le Horne Hotel, Yen Quon avec le Nanking Restaurant. On trouvait aussi les Chinois dans quelques buanderies. Ils lavaient les draps des nombreuses maisons de pension. Tous les Chinois de la région venaient de Canton. Les restaurants chinois devaient être moins chers et meilleurs pour attirer des clients sinon ils ne pouvaient pas durer. Autour des années 50, il y avait environ 20 à 30 Chinois à Rouyn. Mais revenons à la restauration. Le Paris Café des frères Chan étaient l’un des restaurants les plus connus de Rouyn. Cependant, avant la fin de la 2 e Guerre mondiale, les Chinois ne servaient pas encore de cuisine cantonnaise, mais plutôt de la cuisine américaine. J’ai trouvé un menu aux Archives nationales du Québec, à Rouyn, qui vient d’un restaurant chinois et qui nous donne une très bonne idée de ce qu’on y servait dans les années quarante. Je vous donne une partie du menu en anglais.
«To-Day Chef’s Special
Business men’s lunch:
Fried pork kidney with onions............................................................................60c
Fried tomatoes with bacon................................... .............................................60c
Italian spaghetti with meat sauce................................. .....................................65c
Baked Libby’s pork and beans, fried egg...........................................................54c
Fried Maple Leaf sausage, green peas.............................................................54c
Fried beef liver with bacon.................................................................................54c
Fried pork liver with onion..................................................................................54c
Ham or cheese omelette.................... ...............................................................65c
Breaded side pork, apple sauce........................................................................54c
Breaded veal cutlet, brown gravy......................................................................85c
Fried pork steak or cutlet, apple sauce..................................................... ........85c
Fried pork chops, apple sauce....................... ...................................................85c
ROAST:
Roast young turkey with dressing..................................................................$1.00
Prime rib of beef with brown gravy....................................................................85c
Leg of pork, apple sauce...................................................................................85c
SPECIAL:
Fried beef with green pepper.........................................................................$1.25
1/2 barbecued chicken...................................................................................$1.50
Chicken chop suey with mushroom................................................................$1.00
Chicken fried rice with mushroom..................................................................$1.00
Dry pork spare rib or sweet and sour.............................................................$1.00
Fried porterhouse steak, tomato....................................................................$2.00
Fried T Bone steak with celery......................................................................$1.75
Fried beef tenderloin. bacon...........................................................................$2.00
Fried sirloin steak with pickle..........................................................................$1.45
Fried small steak with onion...........................................................................$1.25
Enfin, parlons des Italiens de l’Abitibi. La plupart venaient de l’Italie du Sud où le pouvoir socio-économique était entre les mains de quelques-uns qui exploitaient la population. Des milliers d’Italiens émigrèrent aux États-Unis et au Canada pour fuir cet état de choses et la pauvreté. Beaucoup d’immigrants italiens venus au Canada travaillèrent à la construction des chemins de fer canadiens, d’est en ouest. Ils étaient 3 000 à Montréal en 1904 et d’autres vinrent les rejoindre pour construire la voie ferrée du Transcontinental dont nous avons parlé plus haut. Ils étaient 537, en 1951. Par la suite, plusieurs Italiens sont allé travailler dans les mines de Rouyn et Val-d’Or ou se sont ouverts des commerces. Parmi eux, il faut absolument parler de Jos Montemurro qui a ouvert une épicerie à Rouyn en 1927 et qui a par la suite transmis sa passion à ses enfants qui ont transformé l’entreprise en vaste centre de distribution alimentaire pour tout le Nord-Ouest québécois, le Nord-Est de l’Ontario et la Baie James. M. Montemurro venait de la Calabre, dans le sud de l’Italie. Il était venu rejoindre un oncle à North Bay, en Ontario. Il déménagea au Québec à Rouyn, où il a bâti son magasin. Il faisait venir des produits italiens de Toronto et les revendait à ses amis. Il se mit par après à faire venir plein de produits exotiques pour les immigrants de Rouyn. Dans les années 50, la communauté italienne de Rouyn comptait plus de 500 personnes; elle venait après la communauté polonaise en terme d’importance de la population immigrante. Tout le monde connaît la cuisine italienne québécisée.
Conclusion
Ce que les mines nous ont le plus apporté, en Abitibi, c’est un enrichissement culinaire incroyable par le fait que les mineurs provenaient de tous les coins du monde. Nous avons parlé plus haut de l’apport culinaire des ethnies qui ont fourni des mineurs à l’Abitibi. Cette cuisine internationale s’est d’abord fait connaître dans les boîtes à lunch que les mineurs apportaient avec eux, puis dans les fêtes organisées par les compagnies minières pour leurs employés. De plus, certaines épiceries tenues par des immigrants propageaient les cuisines dans leur environnement. Les Franco-québécois ouverts d’esprit posaient des questions, goûtaient aux mets inconnus et ramenaient certaines recettes chez eux. L’inverse était tout aussi vraie Sur les 50 mines ouvertes en Abitibi avant 1950, 46 se trouvaient sur la fameuse faille de Cadillac qui s’étend de Rouyn-Noranda à Val-d’Or au Québec, mais qui part de l’Ontario à l’ouest. Cette faille est particulièrement riche en or (38 mines) et en cuivre (8 mines). En 1995, la faille de Cadillac avait généré 145 mines dont 70% des mines d’or du Canada. En 1961, plus de 10 000 hommes travaillaient dans les mines.
Ses garde-manger
Le garde-manger sauvage
J’ai dit plus haut que l’Abitibi possédait trois types de forêt, selon la latitude. La flore varie légèrement d’une forêt à l’autre, mais appartient, grosso modo, à la forêt boréale. Vous savez que cette forêt cache beaucoup de secrets comestibles; j’en utilisais plusieurs lorsque j’étais chef. La forêt abitibienne des marécages, autour des lacs et des rivières, possède au moins 6 plantes à tisanes, 4 plantes condiments, une plante qui fait cailler le lait pour faire du fromage blanc, et plusieurs légumes sauvages qu’on peut manger en crudités, en salade, en soupe, en légumes d’accompagnement ou en marinades. Et je ne vous en dis pas plus pour les champignons qui sont très abondants en Abitibi parce que ces derniers aiment souvent les forêts humides de conifères tout comme les arbres morts encore pleins d’eau. Pour ce qui est des poissons, on sait que les premiers colons se sont beaucoup nourris de poissons, en particulier de brochet, de doré et d’esturgeon jaune. Aujourd’hui, les pêcheurs ont le choix d’aller pêcher dans les Zec, les pourvoiries ou les Réserves fauniques. À titre indicatif, je vous donne par ordre décroissant, le nombre de pourvoiries qui offraient la possibilité de pêcher ce poisson, en 2004. Cet ordre correspond en bonne partie à l’abondance de l’espèce dans la région : 19 brochet, 18 doré jaune, 14 corégone, 14 doré noir, 12 perchaude, 9 esturgeon jaune, 7 truite mouchetée, 6 touladi, 3 doré bleu, 2 cisco, 2 achigan à petite bouche, 1 barbotte, 1 omble chevalier et 1 maskinongé. Pour ce qui est du gibier, la plupart des premiers colons allaient chasser le petit gibier autour de la maison. C’était même le cas pour les immigrants ukrainiens et scandinaves, habitués au même genre de forêt, chez eux. Mais pour ce qui est du gros gibier, seules les familles de chasseurs allaient s’en chercher en forêt. Je vous donne maintenant la liste des gibiers que l’on peut prendre dans les pourvoiries, comme je l’ai fait plus haut pour le poisson. 19 ours noir, 16 gélinotte huppée (perdrix), 15 lièvre, 15 orignal, 14 tétras du Canada (perdrix de savane), 7 canard, 6 canard noir, 6 canard malard, 5 bernache (outarde), 4 bécasse, 4 lagopède (perdrix blanche), 4 canard morillon, 2 canard garot, 2 bécassine. Il ne faut pas oublier les autres mammifères trappés d’abord pour la fourrure, qui sont aussi mangés occasionnellement comme le castor, le vison, le rat musqué, la martre, le fisher (la loutre), le renard et l’écureuil roux. L’Abitibi demeure l’une des régions les plus fréquentées par les pêcheurs et les chasseurs avec ses 33 pourvoiries, ses 2 ZEC et sa réserve faunique. Celles-ci accueillent des gens de la région tout comme de la région montréalaise. L’orignal demeure l’aliment le plus convoité par tous.
La ferme
On est loin, aujourd’hui, du temps où tout le monde faisait son jardin et avait sa vache laitière ou son cochon, même dans les villes minières naissantes. Même si beaucoup de denrées arrivent du sud du Québec ou de l’Ontario, il y a encore des grossistes qui persistent à encourager les producteurs régionaux et c’est tout à leur honneur en ces temps de mondialisation de l’agro-alimentaire. Mais faisons un peu le tour de l’agriculture de survie des débuts. Les gens qui arrivaient en Abitibi n’étaient pas tous préparés de la même façon. Certains avaient laissé des terres prospères qu’ils géraient avec compétence et vaillance. C’est beaucoup pour répondre à l’appel de l’Église d’une part, et pour trouver de belles terres pour établir leurs fils que les colons se décidaient de quitter leur région. Je vous donne un exemple qui va nous mettre de plein pied dans ce que je vous raconte. Il s’agit d’une lettre écrite dans la Gazette du Nord, le 31 décembre 1931, par M. Luc Lisotte : «Amos, Qué., 15 janvier 1917 J’ai récolté l’automne dernier (1916), 700 minots d’avoine, d’orge et de pois, 100 minots de choux de Siam, 40 minots de patates, des tomates parfaitement mûries, des oignons, des concombres, etc. Le sol est de première qualité; quant au climat, je crois qu’il égale celui du Lac-Saint-Jean. J’ai vécu 28 ans à Albanel, et je suis parfaitement en mesure de faire la comparaison entre les deux régions... Un autre fait. J’avais ensemencé une demi-acre de fèves sur un terrain préparé au printemps; je jetai parmi cette semence de la graine de mil et de trèfle. Le mil et le trèfle poussèrent si abondamment que la récolte des fèves fut étouffée. Je récoltai 75 bottes de foin dans un terrain ensemencé pour la première fois. Je ne doute pas du tout du succès de la colonisation dans l’Abitibi» Ce fermier ne partait pas de rien. Il avait de l’expérience et il a su tirer partie d’une nouvelle terre avec ses connaissances. À côté de lui, il y eut des gens moins fortunés et moins expérimentés. Ils durent apprendre sur le tas et certains eurent besoin d’aide. Les agronomes jouèrent un grand rôle dans la colonisation de l’Abitibi. Ils prélevaient des échantillons de terre pour les faire analyser, ce qui leur permettait de mieux conseiller les agriculteurs sur les semences à mettre dans tel ou tel sol, ils leur donnaient des moyens d’améliorer la qualité du sol par les moyens du bord en ajoutant de la chaux, du bran de scie, de la paille, de la cendre, etc. ou ils suggéraient un meilleur égouttement ou un labour plus profond.
En 1926, c’était le tour de l’industrie laitière de progresser. L’abbé Charles Minette, reconnu pour ses compétences en la matière, prônait l’augmentation des troupeaux et le choix de vaches reconnues pour l’abondance et la qualité de leur lait. Entre 1926 et 1929, il faisait venir en Abitibi 77 wagons remplis de vaches. Et il a été le premier à parler de Crédit agricole. Peu à peu, la superficie des terres ensemencées a augmenté; ce qui a permis aux agriculteurs d’avoir plus de vaches parce qu’on avait désormais plus de quoi pour les nourrir. Des statistiques prises dans le livre de l’histoire de Barraute racontent qu’en 1928, les cultivateurs élevaient sur leurs fermes, des chevaux, des vaches, des taures, des bœufs, des génisses, des moutons, des porcs, des porcelets, des poules, des oies, des canards, des lapins. Les femmes s’occupaient des jardins et y plantaient des carottes, des choux de Siam, des betteraves, de la laitue, des concombres à mariner, des citrouilles et des épis de blé d’Inde. Plusieurs se faisaient des gallons de bleuets, de framboises, de fraises et de groseilles en conserve. On faisait son beurre, on se faisait de grosses provisions de lard salé. Et l’on se faisait des provisions de lièvres, d’orignal, d’outarde, de perdrix et de touladi qu’on faisait geler et que l’on conservait dans l’avoine, dans des barils placés dans un hangar pas loin de la maison. En 1936, les statistiques ajoutaient les dindes à la basse-cour. En 1993, on ajoutait des chèvres, des agneaux, des pintades et du faisan. On ne dira jamais assez tout l’apport qu’ont eu les Écoles ménagères pour la conservation de notre patrimoine culinaire français, britannique et même amérindien dans certaines communautés, comme les Ursulines et la Congrégation Notre-Dame. En Abitibi, ce sont les Soeurs de l’Assomption qui enseignaient les arts ménagers à Macamic et Amos alors que les Soeurs de Notre-Dame-Auxiliatrice le faisaient à Rouyn. Du côté masculin, les Clercs de Saint-Viateur ouvraient une école agricole en 1936, dans les locaux de l’ancien camp de prisonniers allemands situés à Spirit Lake. Cette école allait durer jusqu’en 1961. Je ne voudrais pas oublier, en terminant, de mentionner les initiatives originales de l’élevage de l’outarde et de la culture des champignons dans des mines d’or désaffectées. L’Abitibi, est à mon humble avis, appelé à de grandes choses au plan agricole, avec le réchauffement du climat qui s’annonce sur notre planète. Les auteurs de l’Histoire de Val-d’Or, des origines à 1995 écrivent : «L’Inventaire canadien des terres a identifié 13 millions d’acres de terre cultivable en Abitibi-Témiscamingue, ce qui constitue l’une des plus grandes réserves de terre cultivable de tout le continent nord-américain. Il ne s’y trouve actuellement que 250 000 acres de terre exploitée. Il y a là un formidable potentiel, de quoi faire rêver à un Eldorado vert. » Qui dit mieux?
Ses recettes
Voyons la cueillette abitibienne des recettes sauvages de même que quelques recettes originales apportées par les immigrants. Vous aurez accès à un répertoire abitibien encore plus important dans les prochains livres consacrés à l’agriculture et aux produits importés puisque l’Abitibi possède une bonne partie de son territoire en terres agricoles et qu’à cause de ses nombreux immigrants européens, a appris à cuisiner avec beaucoup de produits importés.
Code d’identification
AG – Algonquin
BG - Belge
BI - Biélorusse
BR - Les îles britanniques en général
CR – Croate
EC - Écossais
FR - Franco-québécois et français
GR - Grec
IT - Italien
LE - Letton
PO - Polonais
RO - Roumain
SB - Serbe
SL - Slovaque
SW - Suédois
NA - Nouvelle-Angleterre et américain
RU - Russe
UK - Ukrainien
Les spécialités du déjeuner
Galettes dynamiques à la farine de sarrasin, cuites comme une crêpe et servies avec sirop d'érable ou mélasse - FR
Muffins à la farine de kamut, son d'avoine et framboises - BR
Muffins au gruau et bleuets - EC
Muffins aux atocas et pommes - NA
Muffins aux pommes et miel - BR
Muffins d'avoine au miel - EC
Oladi (petite crêpe) au gruau servie avec du miel et de la crème - UK
Quiche à l'effeuillée d'endives, jambon et gruyère - BG
Roulé au miel et cannelle - NA
Tête fromagée d’ours - AG
Les entrées, collations et petits repas
Blinys (crêpes) de sarrasin avec du caviar d’esturgeon jaune - RU
Blinys (crêpes) de sarrasin farcis aux champignons de saison en sauce crème - RU
Bouillie du vendredi (lait épaissi à la fécule de maïs, saupoudré de cassonade, servie le vendredi soir) - FR
Canapés de pain à la mayonnaise, oignon et cheddar râpé - FR
Champignons en sauce au curry avec muscade et persil, servis sur du pain grillé - BR
Champignons marinés au vinaigre de vin blanc, oignon, ail, sucre, jus de citron, eau, laurier, ketchup - GR
Crêpes farcies au jambon en crème de champignons, céleri, champignons, poivrons rouges - FR
Feuilleté à la touladi et au blanc de poireau, servi avec un beurre fondu - RU
Feuilleté à l’Allegretto (fromage de brebis d’Abitibi-Ouest)
Fine lamelle de lard salé cru sur une tranche de pain de seigle avec de l'ail et des rondelles de concombre - UK
Œufs farcis à la truite en conserve avec mayonnaise
Pain de ménage évidé, rempli de sauce trempette à la crème sûre, cheddar râpé, bacon émietté, fromage blanc, lait et oignons verts hachés
Concombre farci au thon, saumon ou truite, mélangé à de la ciboulette, du persil et des olives vertes farcies
Pelures de pommes de terre, évidées et garnies d’ail, poivrons, moutarde de Dijon, marjolaine, thym, origan, cheddar, échalotes, cuites 10 m à 450°F
Petits choux farcis à la truite, céleri, mayo, jus de citron - FR
Pirogies (chaussons) au chou, ou bœuf haché ou brochet ou oignons et œufs durs ou champignons ou porc haché ou fromage cheddar et mayonnaise - PO
Salade de La Sarre avec choux-fleurs abitibiens, cheddar Dallaire et crabe des neiges en conserve, sauce mayonnaise à l'ail, moutarde sèche et paprika
Salade de macaronis au cheddar orange avec tomate, chou-fleur (facultatif), poivron vert, cornichons à l'aneth, oignons verts, oeufs durs et mayonnaise
Salade de pommes de terre aux oeufs durs, persil, sarriette, thym frais, avec oignons verts et mayonnaise, servie avec une fondue chinoise à l'orignal
Salade de pommes de terre aux oeufs durs, saumon ou truite à la mayonnaise, servie sur de la laitue
Salade de riz aux oignons verts, radis, céleri, bovril au boeuf pour servir avec une fondue bourguignonne de caribou ou d'orignal
Salade d’hiver au chou, tomate et cheddar (sopska salata) - SB
Soufflé à l’esturgeon fumé - FR
Tartelettes à la sauce blanche au fromage canadien et oeufs durs - FR
Tomates farcies au brochet, mayonnaise, yogourt, persil, oignon vert, servi avec du pain
Les potages
Bouillabaisse abitibienne avec pommes de terre, carottes, céleri, oignon, doré ou brochet et lait - FR
Ciorba (Soupe à l’agneau au riz, épaissie par un jaune d’œuf mélangé au jus d’un citron, garnie d’oignon vert haché) - RO et GR
Potage au poireau, céleri, oignon, champignons, cerfeuil et persil servi avec des croûtons à l'ail
Soupe à l'orge aux bolets ou aux pleurotes (Zupa grzybowa) - PO et LE
Soupe à l'oseille sauvage (Zupa szczawiowa) - PO
Soupe au cheddar fort avec oignons, carottes râpées, béchamel, moutarde sèche et paprika - BR
Soupe aux champignons, aux pommes de terre et au bacon - SL
Soupe aux légumes (carottes, poireau, pommes de terre, céleri, lait et cheddar)
Soupe de betteraves à l'aneth (Botwinka z koperkiem) - PO
Soupe de brochet à l’aneth et crème sûre ajoutée en finale - SW
Soupe de brochet aux légumes - UK
Soupe de doré au fromage en cubes, carottes, céleri. farine et lait
Soupe de truite mouchetée ou touladi (carottes, céleri, oignons, lait, bouillon de poulet, épaissie à la fécule avec des cubes de cheddar)
Soupe polonaise au chou blanc (bortsch) - PO
Soupe-repas au boeuf haché avec carottes, rutabaga, céleri, oignon, épices à steak de Montréal, tomates aux herbes, jus de tomates, crème de tomates, orge perlé, et sur le dessus, cheddar orange râpé
Les plats principaux
De la forêt
Les poissons
Boulettes de brochet à la purée de pommes de terre et biscuits soda frites dans l’huile - NA
Brochet entier farci de fromage Cottage mélangé à des oignons verts, des champignons sauvages hachés finement poêlés au beurre et du jus de citron, enveloppé de papier aluminium et cuit à point, selon le poids du poisson - UK
Brochette de doré à l'orange sur un riz blanc
Casserole de brochet cuit alternant avec des rondelles d’oignon frit, de fines rondelles de poivron vert, de fines tranches de tomates et du riz demi cuit, le tout couvert du bouillon de cuisson du brochet - CR
Casserole de brochet en morceaux sans arêtes nappés de mayonnaise et saupoudré de cheddar râpé gratinée au four - UK
Casserole de brochet, tranches d'oignons et pommes de terre en lamelles, couvertes de crème de tomate
Darnes de touladi ou saumon au pesto de persil, beurre et pacanes avec tomates séchées et poivre concassé
Doré à la crème et petits pois sur pain rôti
Doré entier (okas) enrobé de glaise et cuit dans la braise à l’algonquine - AG
Doré pané à la bière, servi avec frites - BR
Esturgeon en cubes avec oignons, pommes de terre en dés, pâte de tomate, cornichons sûrs, paprika et un peu de crème, cuit dans une jarre en grès (à fèves au lard) - UK
Filets d'esturgeon jaune braisés au four avec beurre et muscade, servis avec une sauce au cheddar fort de La Sarre
Filets de brochet ou dorés cuits au four avec du beurre fondu, de l'oignon râpé, du basilic et des tranches de tomates
Filets de doré à l'ukrainienne panés dans un mélange de mayonnaise et œufs battus, puis de chapelure, dorés dans le beurre - UK
Filets de touladi sur un lit de tomates et poivron vert, arrosés de jus de citron, au four
Filets de touladi ou saumon de Rosanne marinés avec ail, jus de citron, moutarde de Dijon et sauge, cuit au four servi avec une sauce crème au poivre vert
Gratin de truite fumée et pommes de terre avec oignon rouge en rondelles, céleri, crème sûre et jaunes d'œuf
Gratin de truite ou saumon avec pommes de terre, crème de céleri, cheddar blanc, estragon et tranches de tomates
Pain au brochet, œuf, pain, muscade et crème avec sauce au persil - FR
Pain de brochet avec chapelure, mie de pain, oeufs, crème et persil, servi tiède avec une sauce tartare - FR
Poêlonnée de laquaiches argentées (obakatshisi) sur la braise avec bannique - AG
Esturgeon jaune farci au Grissol, carotte râpée, poivron vert, oignon et beurre fondu
Touladi poché sur divan d'asperges, le tout arrosé de beurre fondu - FR
Truite mouchetée à la manière abitibienne (badigeonnée de muscade, origan aneth, moutarde et cari, arrosée de jus de citron, poêlée au beurre et badigeonnée en finale de jaune d'œuf et finalisée au four, servie sur un riz blanc
Truite saumonée au jus de tomate, gingembre râpé, raifort râpé, ail, tomates, vodka, poivre de céleri, cuite en papillote de papier d'aluminium au four
Truites farcies aux champignons et citron, riz, bouillon de poulet, arrosées de vin blanc pendant la cuisson
Les oiseaux
Bouilli de perdrix aux légumes avec pommes de terre vapeur - FR
Canard sauvage avec une sauce aux cornichons, oignons et mayonnaise
Canards sauvages marinés au porto, clou de girofle, laurier, jus de citron, jus d'orange et zeste d'orange et cuits au four
Cipaille à la perdrix, dinde, filet de porc, lard salé, sarriette, céleri, oignon, pommes de terre râpées et cannelle - FR et BR
Oie sauvage avec sauce chasseur au vin rouge sec et gelée de pommes - FR
Outarde marinée dans une sauce à l'ail et estragon piquante et braisée au four pendant 4-5 h
Perdrix au chou au lard salé, ail et moutarde
Perdrix au chou, soupe à l'oignon en sachet et ciboulette
Perdrix au vin rouge, petits oignons, champignons, bacon et brandy, servie en sauce sur pain grillé - FR
Perdrix avec chou et vinaigre de vin, cuite au Presto, accompagnée de grosses saucisses fumées en rondelles cuites à la vapeur
Perdrix bardées de bacon cuites en casserole avec ail, oignon, carottes et saucisses fumées allemandes, sucre et vinaigre de vin, servies avec des saucisses de porc rôties
Perdrix farcies à la saucisse de porc, parfumée à la sauge et au cognac, cuite au four avec carottes, oignons et épices
Poitrines de perdrix sautées au beurre et mijotées avec de la crème de poulet et de la crème de brocoli, des pommes de terre en cubes, des morceaux de brocoli et des carottes blanchies en tranches
Le gibier
Boulettes d'orignal à la sauce aigre-douce au ketchup et cassonade ou ketchup et sauce chili à l'ail et sauce Tabasco
Boulettes d'orignal haché à la sauce aux pêches moutardée
Boulettes de lièvre avec son foie et ses rognons hachés avec du jambon demi-cuit, de la mie de pain, des oeufs, rôties puis servies dans une sauce au vin rouge déglaçant le fond de la poêle de cuisson, des olives vertes et des champignons
Brochette d’orignal aux quartiers d’oignon et bacon - AG
Casserole de lièvre aux petits oignons, carottes, pommes, ail, thym, romarin et vin blanc - FR
Castor mariné une nuit dans de l'eau froide avec du vinaigre, braisé au four avec lard salé maigre, des carottes, de l'oignon, du céleri- FR
Chevreuil et porc en cubes à la bourguignonne - FR
Cipâte au gibier (lard salé, perdrix, lièvre, chevreuil ou orignal) - FR et BR
Civet de lièvre au vin rouge et cognac, petits oignons et champignons, ail et crème en finale - FR
Civet de lièvre aux carottes, oignons et navet - FR
Civet de lièvre mariné 12 h au vin blanc avec carotte, oignon, poireau, ail, clou de girofle, laurier, cuit avec petits oignons, carottes et champignons en lamelles - FR
Civet de lièvre au chou et grillades de lard - FR
Coeur d'orignal farci - AG
Faisan à la crème et citron avec haricots verts - FR
Fondue bourguignonne à l'orignal avec une sauce aux herbes ou du ketchup aux fruits - FR
Fondue bourguignonne à l'orignal mariné au vin rouge avec oignon et herbes amères - FR
Fondue chinoise à l'orignal
Fondue chinoise de caribou
Fricassée de perdrix aux pommes de terre, carottes, vin blanc, bouillon, poulet et crème - FR
Gibelotte de lièvre avec carottes, oignons, ail, laurier et thym - FR
Hamburger d'orignal aux gros champignons (bolets ou porchinis)
Jeune castor mariné au vin rouge et vinaigre de vin, herbes amères, ail et oignon, farci de porc et veau haché, braisé, dégraissé et servi avec une sauce au vin rouge
Langue d’orignal bouillie servie avec une sauce à la moutarde ou une sauce tomate avec des câpres et des olives noires à la manière de Jean O’Neil
Lasagne à l’orignal - IT
Lièvre en cocotte Sainte-Rose avec épices mélangées, farine grillée, lard salé et oignons
Macaroni long au lièvre à l'étouffée, avec jus de tomate, céleri et chou
Orignal à la bourguignonne - FR
Orignal à la Lady (avec tomates et sauce soya)
Orignal en cubes aux légumes et pommes de terre, cuit au four avec bouillon de boeuf - FR
Osso Buco de chevreuil servi avec des nouilles - IT
Pain de viande à l'orignal et porc haché, biscuits soda, oignons, persil, thym, couvert de bardes de lard
Pâté de ragoût de lièvre couvert de biscuits à la poudre à pâte - BR
Ragoût de castor aux pommes de terre avec grands-pères - AG
Ragoût de lièvre ou perdrix avec grands-pères ou pommes de terre - AG
Rat musqué au presto avec pommes de terre, carottes, oignon et vinaigre de vin
Riz aux tomates, céleri, poivron vert, tomates, pois chiches et bouillon de petit gibier servi avec des saucisses de chevreuil ou de porc et lièvre
Ronde d'orignal en dés aux tomates et céleri
Rosbif d'orignal ou de caribou enrobé de base de poulet et de boeuf, cuit avec eau, bisto et oignon
Rôti d'orignal et de lard aux oignons - AG et FR
Rôti d'orignal saupoudré d'un sachet de soupe à l'oignon cuit avec carottes, champignons et céleri
Rôti d'ours de 1.5 kg, badigeonné de sauce barbecue, enroulé de tranches de bacon et de rondelles d'oignons, de poivron vert, de champignons, saupoudré d'épices à steak, enveloppé de papier d'aluminium, cuit 1.30 h à 350 ° F
Rôti de gros gibier (ours, orignal, caribou des bois) à la sauce aux poivres et oignons
Saucisses de chevreuil poêlées quelques minutes et mises à cuire au four dans une sauce barbecue au ketchup, vinaigre, oignons et sauce Worcestershire
Saucisses de porc et d'orignal au thym, sarriette et biscuits soda
Six-pailles canadien avec boeuf, porc, lard salé maigre, poulet, gibier, épices moulues, ail - FR et BR
Six-pâtes de grand-Mère avec porc, orignal, poulet, perdrix, lièvre, veau ou chevreuil, clou ou épices mélangées - FR et BR
Spaghetti italien avec sauce à l'orignal
Spaghetti avec sauce à l'orignal aux dés de céleri, carottes, rutabaga, champignons, poivron vert et ail, sans tomate
Steak d'orignal à la suisse, avec céleri, poivron rouge ou vert, champignons, oignons
Steak d’orignal aux oignons - AG
Steak d’orignal avec gelée de lingones (airelles vignes d’Ida) - SW
Steak de chevreuil mariné au vinaigre de vin, vin rouge, ail, laurier et ketchup, cuit au barbecue
Tournedos d'orignal fendus à moitié et remplis de Camembert, encerclés de bacon et cuits au four
De la ferme
Betteraves au miel - SL
Boulettes de bœuf haché avec sauce à la crème sûre aux champignons sauvages - RU et SW
Boulettes de poulet haché avec une sauce aux champignons sauvages (Klopsy z grzybami) - PO
Canard domestique braisé avec vin blanc, de la sauge, oignon, porto, ail, céleri, gingembre frais, entouré en fin de cuisson de gelée de bleuets et de bleuets frais
Chicane de légumes au boeuf haché céleri, oignon, carotte, maïs en crème, pommes de terre en dés, cuite sur le feu à feu moyen
Côtelettes de porc au miel
Courge spaghetti avec sauce tomate aux champignons sauvages couverte de cheddar et parmesan
Fettucine aux morilles fraîches d'Abitibi, bacon, crème et porto
Filets de porc à la sauce Teriyaki et sirop d'érable avec ail et Tabasco
Galettes de boulha (purée de pommes de terre mélangée à des oignons et des champignons sauvages frits au beurre - BI
Gigot d'agneau glacé au miel d'Abitibi
Halusky (Petites pâtes faites de pommes de terre râpées, œuf et farine, cuites à l’eau bouillante et servies avec du bacon et du fromage blanc, de chèvre ou de brebis de La Sarre) - SL
Kacha (grains de sarrasin rôtis) aux chanterelles - UK
Lapin à la crème et champignons sauvages (bolets, pleurotes) - FR
Lentilles aux bolets, servies avec des morceaux de concombre glacés au gros sel (mélangés à des cubes de glace) - UK
Maïs au miel abitibien
Nouilles maison aux champignons sauvages - UK
Pizza à la dinde cuite, cheddar, mayonnaise, oeuf et noisettes grillées concassées
Poêlonnée de champignons sauvages frais à la crème sûre - LE
Stew de boeuf aux tomates, gingembre et sirop d'érable avec pommes de terre, oignons, carottes et céleri – NA
Les desserts
Bagatelle aux fraises ou framboises, macarons broyés, sherry, crème fouettée cossetarde
Barres santé aux noix, miel, farine de blé, germes de blé, babeurre et bleuets frais
Beignes au miel - SB
Braquettes (biscuits roulés coupés à l'emporte-pièce rond) du Québec au sucre du pays
Carrés au miel, noix de coco et noix de Grenoble
Carrés aux framboises - BR
Charlotte aux bleuets
Crème glacée maison aux framboises
Crêpes aux bleuets
Galettes blanches à la confiture de fraises - FR et AG
Galettes santé aux framboises, gruau et raisins secs
Gâteau au chocolat et miel
Gâteau aux pétales de roses, glacé à la crème de roses - AF
Gâteau aux pommes et miel - NA
Gâteau renversé au sirop d'érable et aux pommes - NA
Île flottante de petits fruits - FR
Kiselis (compote de pommes aux atocas) - LE
Kissiel aux fraises (purée de fruits épaissie à la fécule) - UK
Lait frappé au yogourt et sirop d'érable
Mousse aux bleuets - FR
Neige aux framboises et zeste d'orange avec yogourt et crème sûre
Pelotes de soeur (pâte à pain roulé, coupée en morceaux de 1” par 2”, frits dans l'huile, fendus et garnis de confiture ou de crème fouettée - FR
Pirogui au fromage blanc et sucre, aux cerises, aux pommes ou à la confiture de petits fruits- RU
Pouding au suif et au miel à l'anglaise - BR
Pouding aux bleuets - NA
Pouding aux carottes et au miel - NA
Pouding vapeur aux bleuets - NA
Roulé au miel et au citron - RO
Short-Cake aux fraises des champs - NA
Tarte aux bleuets de l'Abitibi, garnie de crème fouettée
Tarte aux bleuets du lac Vaudray avec crème pâtissière et glace aux baies d'amélanchier
Tarte aux Bran Flakes, jello aux framboises et yogourt aux framboises avec framboises fraîches ou congelées
Tarte aux framboises en gelée à la crème pâtissière
Tarte suédoise aux petits fruits avec crème pâtissière et crème fouettée - SW
Toutons à la confiture maison - NF
Les boissons
Bière d'épinettes
Bière glacée aux framboises et au citron
Champagne domestique
Jus de bouleau (bëfzu sula) - LE
Ouzvar de pommes séchées (jus de pommes séchées servi en digestif) - UK
Vin de bleuet
Vin de salsepareille