Le lait

La consommation de lait animal par l’homme remonte à la nuit des temps. Mais certaines civilisations ont bâti toute une cuisine autour du lait de leur principal animal d’élevage. Les peuples du centre de l’Europe, riche en pâturages et en prairies, élevaient surtout du gros bétail comme le bœuf et la vache alors que les populations du Sud, au climat chaud et aux régions sèches et dénudées de verdure, élevaient surtout des chèvres et des moutons. Je parlerai des sous-produits du lait comme le fromage ou la crème dans d’autres articles. Parlons donc, ici, du lait de vache, aliment marqueur de notre identité culinaire. Nos ancêtres gaulois élevaient deux types de vache dans le Nord-Ouest de la France, l’une avait un profil convexe et l’autre un profil concave. On a retrouvé la trace archéologique de la race concave, l’ancêtre de la vache normande actuelle. Cette vache a, par la suite, été croisée avec les vaches amenées auparavant par les Francs et les Vikings, en France, et par les Angles et les Saxons, en Angleterre.

C’est donc cette vache que nos ancêtres normands et jersiais ont amenée au Québec, du XVIIe au XIXe siècle. La vache bretonne, plus proche de l’ancienne vache celtique, a aussi été amenée chez nous. Ce qu’on appelle la vache canadienne est issue d’un croisement de ces vaches apportées au XVII e siècle. Mais au début du XXe siècle, on a importé une vache des Pays-Bas, la Holstein, qui domine notre paysage agricole, aujourd’hui. C’est l’une des plus grandes productrices de lait au monde, en terme quantitatif. Chaque race de vache donne un lait typique plus ou moins riche en gras. C’est pourquoi les fermiers choisissent une race en fonction de ce qu’ils veulent faire comme produit. J’en reparlerai dans mes articles sur le beurre, la crème ou le fromage. Tenons-nous en, pour l’instant, au lait lui-même. 

Avec le lait, on fait des soupes, des sauces et des desserts. Les soupes au lait se font, chez nous, principalement avec des féculents comme le tapioca ou le sagou ou des céréales comme le riz ou l’orge. On en fait beaucoup avec des coquillages, des crustacés et des poissons colorés comme la truite ou le saumon. Enfin, on fait beaucoup de soupes au lait avec des légumes autochtones comme le maïs, les haricots rouges, la courge, la citrouille et le topinambour, comme des soupes d’été aux légumes verts en feuilles. Les béchamels originaires de Normandie font vraiment partie de notre héritage tout comme les blanc-manger et les crèmes faites avec du lait épaissi et parfumé. En mettre au menu souvent, c’est aussi une façon de faire tourner notre économie locale beaucoup basée sur la production laitière. Je ferai le tour de ces habitudes culinaires, au fil du temps. On se réfèrera à l'article sur le boeuf, la vache et le veau, dans mon 4e volume, l'Histoire de la cuisine familiale du Québec, la plaine du Saint-Laurent et les produits de la ferme traditionnelle, de la page 977 à 1027, pour plus de détails. 

Pot de lait de la Montérégie