La cuisine de Québec, la Côte de Beaupré et l'ile d'Orléans

Au XVI e siècle, Québec est iroquoïen et un peu français. Il s’appelle Stadaconé.

Quelle est cette civilisation?

Ses origines locales et culturelles.

Les Iroquoïens sont d’une part, descendants des Archaïques maritimes de l’Est du Québec déjà présents dans notre territoire, il y a 9 000 ans. Ils sont aussi descendants des Archaïques laurentiens qui habitent sur les rives du fleuve Saint-Laurent et des Grands-Lacs ontariens depuis 6000 ans. Les archéologues pensent qu’ils sont aussi issus de tribus d’agriculteurs montés progressivement des États américains, au sud des Grands-Lacs, il y a environ 4 500 ans. Cette civilisation métissée s’installe au sud des Grands-Lacs d’où elle s’étend par la suite au nord des Grands-Lacs puis dans la Plaine du Saint-Laurent, il y a 4 000 ans.

Ses préférences alimentaires

1)    Les poissons et les mammifères marins

2)    Les plantes sauvages et cultivées : courge (-7000 ans, cultivées il y a 3 000 ans); petit orge, chou gras, renouée, maygrass (phalaris caroliniana), sumweed ou marsh elder (iva annua), et des tournesols.

Sa cuisine : principalement axée sur les végétaux cultivés ou sauvages, assaisonnée avec du poisson frais ou fumé ou du poisson séché avec arêtes et réduit en poudre ou bien avec une huile de poisson gras, de mammifère marin, de tournesol ou de noix locales. Elle se pratique dans une vaisselle de céramique et de bois.

Ses premiers contacts culinaires avec l’Europe : Chaque été, les Iroquoiens de Québec allaient pêcher ou chasser le bélouga ou les phoques du fleuve pour se faire des provisions de poisson fumé ou d’huile de mammifère marin : c’est  l’été 1534 qu’ils ont rencontré Jacques-Cartier à Gaspé en allant se chercher du maquereau pour l’hiver. Ils allaient aussi se chercher du saumon sur la Côte-Nord, comme le faisaient leurs ancêtres, les Archaïques maritimes et laurentiens.

Comment réactualiser cette cuisine aujourd’hui?

1.Cuisine santé modèle où les protéines deviennent minoritaires par rapport à un apport important en légumes et en maïs séché, considéré comme une céréale semblable au blé; d’où le terme de blé d’Inde donné par Jacques Cartier, à ce légume-céréale.

2.Réintroduire la semoule de maïs comme base glucidique de certains repas; la sagamité est la cousine propre de la polenta italienne ou mamaliga roumaine.

3.Faire des repas végétariens ou des salades de fèves rouges avec de l’huile de tournesol ou de noix.

4.Associer les poissons fumés iroquoiens (saumon, esturgeon, anguille, barbue) aux graines ou aux légumes iroquoiens (maïs, courge, haricots, topinambours, graines de tournesol, noisettes, noix cendrées, etc.

5.Déjeuner avec un gruau de maïs aux fraises, framboises ou mures.

Au XVII e siècle, Québec est algonquien, français, huron et un peu anglais

Pourquoi les Iroquoïens ne sont plus à Stadaconé?

Il n’existe pas vraiment de témoignage de leur disparition sinon des allusions par Champlain et quelques autres témoins revenus au Canada après le départ des Français en 1542.L’hypothèse de génocide par un peuple qui voulait le contrôle du commerce avec l’Europe par le Saint-Laurent est proposée comme explication de cette disparition.  Donc un peuple à l’ouest de Cornwall : hypothèse des Hurons ? des Iroquois? des Algonquins? Quoi qu’il en soit, les Montagnais de Tadoussac ont occupé Québec, après le départ des iroquoïens. C’est eux qui ont baptisé l’endroit Québec.

Qu’est ce que la civilisation algonquienne?

Cette civilisation descend des Archaïques du Boucler Canadien qui vivaient dans la forêt mixte et boréale au nord des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent. On pourrait l’appeler la civilisation de l’écorce. (Maisons, canots, vaisselle, etc.)

Ses préférences alimentaires

1) Le gros et petit gibier avec le poisson fumé en hiver.

2) Les poissons de lac ou de mer avec du gibier fumé, en été.

3) Les petits fruits sauvages frais ou séchés, en accompagnement du gibier ou du poisson, selon les saisons.

Sa cuisine : axée sur les protéines animales, avec des petits fruits en assaisonnement. Deux modes de cuisson : bouilli dans un plat d’écorce à l’aide de pierres brulantes déposées dans le plat d’écorce ou rôti à la corde tournante.

Ses premiers contacts avec l’Europe : deux nations de langue algonquiennes ont vu les premiers pêcheurs européens et les chasseurs basques de baleines dans le fleuve : les Innus de la Côte-Nord, et les Micmacs gaspésiens. Ils ont fait, dès le XVIe siècle, des échanges de nourriture contre des fourrures désirées par les Européens, dont la farine de blé et les pois.

Comment la réactualiser aujourd’hui?

1. Associer le gibier ou le poisson aux fruits plutôt qu’aux légumes.

2. Faire des charcuteries avec du gibier fumé.

3. Faire des potages de gibier épaissis à la farine de maïs.

4. Faire des pâtes de petits fruits.

5. Se servir de pain bannique comme type de pâte ou comme pain.

Et qu’est-ce que la civilisation française du XVIIe siècle?

Ses origines culturelles

Les Celtes sont des tribus originaires d’Asie centrale ayant migré vers l’Ouest de l’Europe progressivement avec leur métallurgie. Leur arrivée en France se situe entre – 2850 et – 2450. Ils sont des agriculteurs qui cultivent des céréales avec le blé et l’orge en priorité, des légumineuses comme les pois secs, les lentilles, les gourganes, des racines comme les carottes, les panais, etc, et du chou de différentes forme. Ils sont aussi des éleveurs de porc, de bœuf, de poule, d’oie et de mouton. Ils sont de grands amateurs de porc et d’oie qu’ils gardent pour leurs fêtes annuelles. Le bœuf vient en second et est réservé au Solstice de l’été après la naissance des veaux. Plusieurs groupes celtiques viennent s’installer en France, puis dans les iles Britanniques avec des variantes de ces préférences ethniques.

Les Romains sont un peuple originaire aussi d’Asie Centrale qui vont construire un empire en Europe et qui finissent après des centaines d’années de conflits avec les Celtes, par imposer leur présente dans toute la France. Ils sont aussi des agriculteurs dont le blé représente l’aliment principal. Ils sont grands consommateurs d’huile d’olive, de vins, que les Chrétiens vont adopter comme aliments symboliques de la religion chrétienne. Ils ont construit, à cause de leur climat plus chaud qu’en Gaule, une cuisine plus goûteuse avec des sauces relevées, avec des fruits ou des légumes en salade, de nombreuses pâtisseries dont les crêpes, les gâteaux, les tartes, les tourtes ou pâtés, les beignets, etc. Ils amènent la cuisine festive en Gaule avec les épices importées d’Asie, le miel, mais aussi plein de modes et d’aliments aujourd’hui disparus (langues d’oiseau, mamelle de truie, etc.). Leur cuisine a beaucoup été influencée par la Grèce qui elle, l’avait été par la Perse.

Les Germains sont des tribus originaires d’Asie centrale. Ils sont à l’aise avec le froid et les forêts de conifères. Comme les Celtes et les Romains, ils sont divisés en multiples sous-groupes que les Romains ont identifiés. Ceux qui nous concernent le plus sont les Francs et les Vikings. Les Francs conquièrent la Gaule en 476 de notre ère et les Vikings s’installent sur les bords de la Seine, en Normandie, vers l’an 800 de notre ère. Ce sont de grands éleveurs de bétail comme les Celtes : ils aiment particulièrement le bœuf.

Les Français du Nord-Ouest de la France qui ont peuplé Québec et ses environs sont donc particulièrement germaniques, celtiques et romains.

Ses préférences alimentaires? La France ajoute aux deux cuisines autochtones, ses 3 cuisines fondatrices avec un gout pour le pain de blé, les viandes de porc, de bœuf et de volaille, les légumes verts dont le chou, les laitues, les concombres, un gout pour les produits laitiers comme le beurre, la crème, le lait, le lait caillé (yogourt) et les œufs.

Sa cuisine : Les Français cuisinent dans des pots et des poêles de métal qui peuvent résister à des feux chauds et rapides. On aime les soupes au lait de légumes ou de poisson en été, les soupes de viandes ou de légumineuses en hiver. On accompagne les viandes ou les poissons de légumes en sauce ou de salades. On mange des fruits de saison et des noix à la fin du repas et des desserts festifs lors des grandes fêtes annuelles ou les grands évènements de la vie.

Ses premiers contacts avec les autochtones iroquoiens et algonquiens sont faits par des pêcheurs originaires de la Normandie et de la Bretagne, puis officiellement par par des équipages de bateaux sous la gouverne de Jacques Cartier en 1532, 1535 et 1541, puis en 1599, 1601 et 1618 , par des équipages sous la gouverne du géographe Champlain qui établit la première alliance avec les Montagnais et leurs alliés autochtones de langue algonquienne et huronne, à Tadoussac, en 1601. Ils partagent un repas où l’on mêle denrées autochtones et françaises qui vient sceller leur nouvelle amitié.

Comment réactualiser la cuisine française du XVIIe siècle, aujourd’hui? En remettant les potages de légumineuses à l’honneur, en faisant son pain de ménage, en variant ses salades avec des feuilles, des fleurs, des légumes colorés, en refaisant des sauces blanches, du blanc-manger, du fromage blanc, des grosses crêpes soufflées, des tartes à la crème et des omelettes aux légumes ou aux fruits de saison. En n’oubliant pas nos rôtis de porc ou de bœuf du dimanche ou nos oies festives le Premier de l’An.

Comment se vit la présence anglaise du XVIIe siècle? Faisons un peu d’histoire : Les frères Kirke font la conquête de Québec de 1628 à 1632. David Kirke est l’ainé d’une famille de marchands d’origine écossaise qui fait du commerce entre la France et l’Angleterre. Il est lui-même né à Dieppe et est parfaitement bilingue. Il répond à la demande du roi Charles Premier d’Angleterre de conquérir le Canada. Ce qu’il réussit à faire en 1629. Les Français retournent en France mais quelques-uns demeurent à Québec, dont la famille de Louis Hébert. Les frères Kirke tous nés en France sont traités de traitres par les Français. Leur double allégeance va leur jouer des tours et les mettre dans des situations difficiles après leur aventure au Canada. La Nouvelle- France est remise à la France en 1632, après le traité de Saint- Germain-en-Laye. David Kirke devient gouverneur de Terre-Neuve où il y a de nombreux pêcheurs français installés sur la côte-ouest de l’île et dans la Baie de Plaisance.

 

Comment se vit la présence huronne à Québec? Quelles sont d’abord ses origines culturelles et locales? les Hurons habitent au nord du lac Ontario, sur les rives de la Baie Georgienne. Ils sont d’origine iroquoïenne comme les Iroquois, les Neutres, les Pétuns et quelques groupes autochtones au sud des Grands-Lacs. Les nations iroquoises sont leurs ennemis jurés depuis quelques centaines d’années. Les Hurons se sont donc alliés aux nations algonquiennes comme les Algonquins et les Montagnais.

 

Leurs préférences alimentaires : ils sont, comme leurs cousins iroquoïens, des agriculteurs prospères avec un régime végétarien plus important que leurs cousins iroquois : l’ottet huron, plus connu sous le nom de sagamité, est leur plat de base. Ce sont de grands voyageurs et des gens d’affaires qui veulent faire du commerce avec les Français. Ils se convertissent progressivement au catholicisme et acceptent l’invitation de s’établir à Québec, après le génocide de leur communauté, en 1650.

Leur cuisine : le contact journalier avec les Français de Québec transforme les 2 cuisines qui vont désormais se métisser. Marie de l’Incarnation et les Jésuites racontent comment les Français cuisinent de plus en plus avec des produits autochtones, à la manière huronne. On mélange la cuisine normande avec la cuisine huronne pour faire les premières recettes-fusion de Québec et du Québec : soupes au lait et aux poissons locaux ou aux légumes locaux. La soupe aux fèves rouges avec lard salé et lait devient une soupe signature de Québec, comme celle au bacon, maïs frais et lait ou celle aux pois, blé d’inde lessivé et lard salé, en hiver.

Ses contacts avec les Français et les nations de langue algonquienne : les Hurons  joueront un grand rôle pour la fusion des autochtones du Québec. Ils commerceront amicalement avec les deux groupes et permettront aux nations autochtones du Nord de faire entrer le maïs dans leur culture. Les Algonquins, les Micmacs, les Abénaquis et les Malécites sont des nations de langue algonquienne qui se mettront à l’agriculture comme eux, avant même l’arrivée des Français. Cette amitié sera renouvelée chaque année par une rencontre sur la pointe de Lévis, devant Québec. Le gouverneur français puis anglais participera toujours à leurs festivités annuelles, à la fin de l’été.

Comment réactualiser la cuisine métissée de nos ancêtres hurons, algonquins, abénaquis et français? En faisant des salades de verdures au saumon fumé, anguille fumée et esturgeon fumé avec des câpres et des rondelles d’oignon rouge. En faisant des potages de courges et de carottes ou des potages de navet au sirop d’érable, ou des soupes aux haricots rouges et lait, ou des soupes de truite mouchetée ou de barbue ou barbotte au lait et légumes racines, des soupes aux pois au maïs lessivé. En faisant  des fèves au lard d’origine abénaquise avec du sirop d’érable et du lard salé, des fèves au lièvre et à la perdrix avec de la mélasse, du succotash algonquien avec du porc et du chevreuil local, etc.